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Document consultable au format PDF sur la précarité et la fabrication de l’information en France , par Alain ACCARDO.
Issopha.
« MALJOURNALISME, LE SUJET QUI FACHE »
Publié le lundi 7 octobre 2002
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A propos de Bévues de presse de Jean-Pierre Tailleur (ed. Félin, 2002).
La presse française est souvent médiocre, parce que les journalistes travaillent mal. C’est l’implacable constat dressé par un journaliste, Jean-Pierre Tailleur. Entre l’enquête journalistique et la recherche documentaire, Bévues de presse décortique de nombreux cas de manque de professionnalisme dans – et non pas « de »- nos entreprises.
Lancé en 1998 sous la direction de Christine Ockrent, avec le soutien du Monde, l’hebdomadaire L’Européen repose » essentiellement sur des travailleurs précaires ou intérimaires, dont la raison d’être (écrire sur l’Europe) est louable mais floue « . Sa courte existence a pourtant bénéficié d’une invraisemblable complaisance de la part des journalistes médias des grands journaux.
Cet exemple illustre la première plaie de la presse française : elle privilégie les « grandes signatures » et les » articles d’opinion « , au détriment des informations pertinentes sur les faits [1]. Mais, ajouterons-nous, la presse française méprise peut-être trop le lecteur pour le croire capable de se forger une opinion.
Encore faudrait-il lui en donner les moyens. La plupart des articles épinglés pèchent par le manque de faits, » ces « hard facts » concrets à la base du journalisme, qui distinguent cette discipline de la littérature ou de la confection de rapports de synthèse. «
Titré » Le petit journalisme des grandes institutions « , le deuxième chapitre est accablant. Oui, une certaine presse a étouffé le scandale de l’Association pour la recherche sur le cancer (ARC), dont l’un des administrateurs était Jean Miot, alors président de
la Fédération nationale de la presse française (FNPF [2]) et dirigeant du Figaro. Les » reportages » d’une autre figure de ce quotidien, lauréat puis juré du prix Albert Londres [3], maltraitent volontiers les faits au profit des mêmes diatribes qu’alignent ses essais.
Quelques journaux n’ont pas tu qu’un des rédacteurs du Monde chargé de couvrir l’affaire du sang contaminé » pigeait » pour une société de Michel Garetta, une des principales personnes mises en cause. Mais la » commission » d’enquête diligentée par la direction du Monde n’a pas vu la » trace d’une influence « de cette collaboration extérieure dans les » textes publiés par Le Monde « à propos du sang contaminé. Après enquête, le journaliste américain Mark Hunter estime pourtant que le » pigiste » de Garetta » a pris le parti du docteur Garetta tout au long du scandale » (Médias Pouvoirs, 2e trim. 1998).
Les développements sont fréquemment étayés d’une comparaison avec les pratiques en vigueur dans d’autres pays. Quand on découvre qu’une journaliste du Washington Post a » bidonné » le reportage qui lui a valu le prix Pulitzer, le Post rend compte de ses fautes, en publiant une auto-enquête de 18 000 mots. Le médiateur est recruté hors du journal. » Les conclusions du médiateur ont ensuite été validées dans un document de cinquante pages du Conseil national de la presse « .
Autre » vache sacrée « , le Canard enchaîné est l’objet d’un tir nourri, pour sa « passivité face à des pans entiers de l’actualité « et ses » approximations fréquentes « . Le volatile, indulgent pour un Roland Dumas (ex-avocat du Canard…) au cœur de la tourmente judiciaire, peine aussi à se démarquer quand un de ses reporters est mis en cause pour avoir, dans le livre L’Affaire Yann Piat, proféré de graves accusations contre deux personnalités politiques. Le contenu de ce livre se situe dans le prolongement d’articles publié dans Le Canard, démontre Jean-Pierre Tailleur.
Nous ne nous attarderons pas sur
la Presse quotidienne régionale (PQR), pour laquelle l’auteur est sévère : » aux antipodes du journalisme d’investigation, elle collectionne les erreurs jamais sanctionnées « ni corrigées (citations tronquées, altération des noms propres, approximations, articles promotionnels…).
Le 16 août, Libération réussissait à rappeler les louanges dont les médias gratifiaient il y a encore quelques mois Jean-Marie Messier, sans que l’article contienne un nom de journal ou de chaîne radio ou télé ! A contrario, Jean-Pierre Tailleur produit les pièces de sa démonstration, et les noms des journaux fautifs. Sa franchise n’est peut-être pas étrangère au silence qui a entouré la parution de Bévues de presse [4], alors que le moindre essai insipide d’un médiacrate connu est volontiers plébiscité.
Parmi les contributions épinglées dans le chapitre sur la » stérilité des débats publics « , un rapport présenté en 1999 au Conseil économique et social [5], qui tente de noircir les médias nord-américains : on peut y lire à propos du « Monicagate » que » le très sérieux Newsweek « a repris » sans vérification aucune, la rumeur diffusée sur le Net par un internaute indépendant « . En fait, c’est exactement l’inverse qui s’est produit… [6]
Les » garde-fous » sont » défaillants « , regrette Jean-Pierre Tailleur. Il reproche aux écoles de journalisme la quasi-absence de la déontologie dans leurs programmes, et aux syndicats de se concentrer » sur les revendications salariales et statutaires. On ne les entend pas inviter les délinquants de la profession à changer de métier « .
La fin de l’ouvrage pèche par l’approximation dont l’auteur se désole ailleurs. Il regrette que
la Commission de la carte [7] ne soit pas » dotée de véritables pouvoirs de sanction « , de » moyens « pour » évaluer l’honnêteté professionnelle des détenteurs « , mais se contredit quelques lignes plus loin : » ce n’est pas sur la base de critères déontologiques « que la carte est attribuée. Pourquoi donc s’étonner que le site Internet de
la Commission » ne parle nullement d’éthique « ? Ses compétences étant édictées par la loi, elle ne saurait devenir de son propre chef un » ordre des journalistes « . L’auteur prétend également que la carte de presse » permet de bénéficier « des » fameux 30 % d’abattement « .
Souhaitons que ce livre joue un rôle fondateur, tant l’analyse du travail journalistique n’est pas courante en France, à l’exception de quelques » affaires » impliquant des » stars » de la télé. Mais au-delà du diagnostic, la thérapie nécessaire prescrit que la presse fasse preuve de » plus de volontarisme pour reconnaître ses insuffisances et traquer ses fautes « .
PS : Article paru dans « SNJ Info », journal de la section Région parisienne du Syndicat national des journalistes (SNJ), septembre 2002.
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[1] Lire « Deuil national » (Note d’Acrimed, janvier 2003).
[2] Le patronat de la presse (Note d’Acrimed).
[3] Pour en savoir plus sur ce Prix (Note d’Acrimed).
[4] « Bévues de presse. L’information aux yeux bandées », de Jean-Pierre Tailleur. Editions du Félin, février 2002, 239 pages, 19,80 euros.
[5] Pour en savoir plus sur le CES. Note d’Acrimed.
[6] A ce sujet, lire les remarques d’Ignacio Ramonet dans La fin du journalisme, par Ignacio Ramonet, un débat d’Acrimed. Note d’Acrimed.
[7] Pour en savoir plus sur la « Commission de la Carte de presse ». Note d’Acrimed.
Un débat d’Acrimed de février 1999
La fin du journalisme
Le 16 février 1999, Action Critique Médias recevait Ignacio Ramonet, universitaire, directeur du Monde diplomatique, auteur de
La Tyrannie de la communication (éd. Galilée). Voici des extraits (parus dans le Bulletin n° 5 d’Acrimed) de l’intervention d’Ignacio Ramonet et du débat qui a suivi.
Trois sphères sont en train de fusionner : la sphère de l’information, celle de la communication (le discours publicitaire, la propagande, le marketing, les relations publiques…), et celle de la culture de masse, c’est-à-dire une culture soumise par définition aux lois du marché, et qui se soumet à la sélection du marché. Plus précisément, l’une de ces sphères, celle de la communication, absorbe les deux autres. Il est de plus en plus difficile de distinguer ce qui relève de l’information, de la communication ou de la culture de masse. De plus en plus, un discours publicitaire et un titre de journal sont imaginés sur le même principe : accrocher, prendre des licences parfois importantes par rapport au contenu. L’effet de communication compte plus que l’effet d’information. Ce qui compte c’est d’avoir un contact ? qu’il soit visuel ou sémantique, etc. ? avec celui qui lit.
1. Trois qualités de l’information
Dans l’information, la communication ou la culture de masse, trois qualités sont recherchées : la simplicité ; la rapidité (des textes courts, des spots…) ; la distraction, l’amusement.
Ces trois qualités traditionnelles de la culture de masse ont colonisé peu à peu le discours du marketing, de la publicité et aujourd’hui les médias d’information, même les plus sérieux, gagnés par l’idée de séduire. Il faut faire le beau pour attirer le public. Sur le plan industriel, cette fusion correspond à la concentration. Quand, au début des années 70, le concept de communication a été rendu grand public par Mac Luhan, la communication était un domaine circonscrit. Aujourd’hui, on ne sait pas, au plan industriel, quelles sont les limites de la communication. Parce que sont venus dans le domaine des industries de la communication des industriels qui n’avaient pas une culture de la communication. Parmi les trois principaux groupes de communication, il y a un marchand d’armes (Matra), un marchand d’eau (Vivendi) et un marchand de béton (Bouygues). Aujourd’hui la communication se fait en grande partie à l’échelle planétaire et par les satellites, donc toutes les industries qui ont à voir avec les satellites font de la communication. L’espace de l’industrie de la communication s’est étendu. Trois machines à communiquer fusionnent en raison de la révolution numérique : téléphone, ordinateur et téléviseur. Les industries qui appartenaient à l’informatique relèvent de la communication. Sur le même écran, vous pouvez avoir à la fois du texte, du son, et de l’image, les trois éléments que le numérique transmet.
2. Trois autres caractéristiques de l’information
La surabondance : il n’y a jamais eu autant d’information à notre portée.
Mais la surinformation peut provoquer de la désinformation. Il existe une censure démocratique. La censure est une donnée structurelle de tout pouvoir. Actuellement, le système censure par surproduction, par asphyxie de celui qui consomme.
Dans la tradition humaniste et démocratique, on établit un lien entre la quantité d’information et la quantité de liberté. Au fur et à mesure que je réclame le droit de communiquer, que j’ajoute de l’information, cela va favoriser la liberté. Désormais, ajouter de l’information n’augmente pas la liberté. Peut-être allons-nous vers une société ou infinie information égale à zéro liberté. Cette surinformation agit comme une nouvelle forme de violence. On ne la voit pas comme cela car les sociétés occidentales sortent de périodes d’obscurantisme. Je pense que la communication est devenue une idélogie et un impératif : il y a obligation de communiquer. La communication remplace le paradigme du progrès. Le progrès avait pour objectif de pacifier les sociétés, c’est aujourd’hui la communication. C’est un lubrifiant social. Communiquer est un verbe intransitif dans la réalité : on ne communique pas pour dire quelque chose, on communique. L’objectif est de communiquer et le contenu est devenu très secondaire. Ce que les machines à communiquer nous enjoignent de faire, c’est de les utiliser. Donc la société accepte l’idée que la communication va prendre la place du progrès.
La vitesse : C’est un des paramètres traditionnels de l’information. Une information rapide est toujours plus intéressante qu’une information lente. Aujourd’hui, nous avons atteint la vitesse maximale : celle de la lumière, c’est l’instantanéité. Quand on dit que le journaliste est l’analyste d’un jour, il y a encore dans ce mot un délai de 24 heures. Mais aujourd’hui les journalistes sont devenus des instantanéistes. Le journaliste est déjà de trop. Car la relation informationnelle était triangulaire, entre l’événement, le médiateur, et le citoyen. Mais dans le système actuel, les caméras de captation de l’information suffisent. Il n’y a plus que l’événement et le consommateur. L’information n’est plus une construction intellectuelle mais une transmission. Informer ce n’est pas répondre à des questions, c’est faire assister à l’événement. Le média pense faire de l’information contemporaine quand il donne à celui qui le consomme l’illusion d’assister à l’événement. CNN par exemple prétend nous montrer les événements en direct-live qui n’ont pas forcément du contenu. En presse écrite aussi on multiplie les reportages de terrain.
L’information est essentiellement une marchandise. Donc elle est davantage soumise aux lois du marché qu’aux lois de l’information. La valeur d’une information ne dépend pas de la vérité mais du nombre de personnes susceptibles de s’y intéresser, de son marché. Cette loi est la vraie trieuse de l’information.
3. Trois fausses affirmations
Voir égale comprendre : plus un média me proposera en direct de l’information, plus je serai satisfait parce que j’aurai le sentiment d’avoir été moi-même le témoin de ce qui se passe. Jusqu’à présent, on essayait de faire de l’information en respectant un certain nombre de règles. Si l’information n’est pas une science, elle est censée s’appuyer sur des sciences humaines, comme par exemple la sociologie et l’histoire, qui permettent une approche construite.
Désormais, si l’information, c’est faire assister à l’événement, on s’appuie sur un genre télévisé : le sport en direct. On informe comme on montre un match, sur le même principe.
Voir c’est comprendre, c’est l’équation contre laquelle se sont élevés les rationalistes. Voir c’est comprendre, c’est le procès de Galilée, c’est l’illusion des sens. D’où tous les malentendus possibles, surtout à l’heure du virtuel, des images de synthèse, où voir du faux ne peut pas être distingué de voir du vrai.
Y être suffit pour savoir : D’où l’idée qu’on n’a pas besoin des journalistes. Il suffit d’y être pour pouvoir témoigner. Un témoin est un journaliste, le bon journaliste est un bon témoin. Quand les radios en continu veulent agir sur l’instant, elles se précipitent sur le téléphone, trouvent quelqu’un qui parle français là où ça s’est passé, et lui demande. Et souvent la personne qui parle fait écho de ce qu’elle a elle-même entendu dire. Or un témoin ( ce terme vient d’un mot grec qui veut dire martyr ) n’est pas forcément un bon transmetteur de l’information. Dans un de ses films, Kurosawa montre comment cinq personnes vivant exactement le même événement, en proposent cinq versions totalement différentes. Etre témoin c’est être impliqué, happé par l’événement, donc c’est ne pas avoir de distance suffisante. Le temps médiatique est instantané, le temps de la réflexion est plus éloigné.
Répéter c’est démontrer : Quand à propos d’un événement, tous les médias disent la même chose, c’est que c’est vrai. On l’a vu avec la guerre du Golfe, Maastricht ou l’euro.
Questions et réponses
Va-t-on vers la fin du journalisme ?
Ignacio Ramonet : Le système n’a plus besoin de journalistes. Les journalistes ont perdu leur spécificité. Il faut se fermer les yeux pour ne pas le voir. Entre 1850 et la fin du 19e siècle, c’était la seule profession qui avait le monopole de l’information de masse. Cette spécificité a disparu.
Aujourd’hui, toutes les institutions produisent de l’information, mais aussi tous les individus peuvent produire de l’information à l’échelle planétaire, avec Internet. Rien ne vous empêche d’ouvrir un site web chez vous ( si l’on excepte la limite économique, mais 20 000 francs vous suffisent pour pouvoir être relativement bien équipé ) et vous avez un média qui vous permet de parler au monde entier. Après tout, l’affaire Clinton-Lewinsky c’est Matt Drudge qui l’a sortie, et il n’était pas hyper-équipé, en tout cas moins que Newsweek [1] …
Les institutions, de tous ordres, politiques, économiques, culturelles, sociales, syndicales, etc. produisent de l’information. Très souvent cette information est pré-digérée pour les journalistes. Ce qui leur reste, c’est de diffuser cette information, mais seulement dans certains milieux, parce que, dans d’autres, les institutions s’en chargent. Les publications faites par des annonceurs, relativement bien, se multiplient. Les groupes qui possèdent les médias contrôlent les médias, non pas de façon primitive et primaire, pour faire de la communication sur ce qu’ils font, mais indirectement aussi pour ne pas nuire à ce qu’ils font. Déjà, beaucoup de journalistes travaillent pour des groupes. Ces groupes sont en mesure de contrôler la communication à la source. Le journaliste est là pour donner la caution d’une certaine objectivité pour un public innocent.
Non seulement ils sont en voie de disparition mais c’est souvent des alibis pris en otage pour diffuser une information qui sert les intérêts de tel ou tel groupe. C’est une vision noire mais je pense qu’on est dans le vrai. Je complète : dans de nombreuses capitales il y a déjà plus de journalistes qui travaillent pour des médias d’entreprises, de marques, d’institutions, d’annonceurs, des médias institutionnels, que de journalistes qui travaillent dans les grands médias.
Dans un souci de productivité, le temps fait de plus en plus défaut aux journalistes. Pourquoi les grands groupes industriels dépensent-ils des fortunes colossales pour acheter telle entreprise d’information, alors qu’ils accordent aussi peu de temps aux journalistes ?
Ignacio Ramonet : Les groupes qui cherchent à contrôler les médias en sont encore à croire que l’influence dans les esprits est proportionnelle à l’importance du média. Leur connaissance de ce qu’on appelle les effets en matière de réception est assez primitive et archaïque. Ils pensent qu’il peuvent gagner en capacité à manipuler les esprits. En réalité, l’expérience montre que c’est plus difficile.
Deuxièmement, posséder un média produit un prestige non négligeable. Dans TF1 un pouvoir, Pierre Péan a bien montré quel était l’objectif de Bouygues quand il a racheté TF1. A un moment, il négociait avec Balladur, entouré de ses conseillers. Ils avaient fait un audit de TF1, qui chiffrait la chaîne à telle somme. Les services du gouvernement en étaient arrivés à peu près à la même somme. Et Balladur avait dit à ses conseillers « ce sera ça, plus 20 % ». Les conseillers de Balladur eux-mêmes avaient trouvé que c’était excessif. Quand on annoncé la nouvelle à Bouygues, les conseillers ont dit : « laissez tomber ! ». Bouygues a dit » c’est offert, c’est très bon marché, j’achète. Ce n’est pas une télé que j’achète, c’est un instrument d’influence « [2].
LCI a été créée sur le même objectif. 365 journaux télévisés du soir c’est insuffisant pour les milliers de décideurs qui font appel à beaucoup de béton. Il fallait une chaîne de télévision qui ne fasse que les recevoir.
Tout cela n’a rien à voir avec la communication mais avec l’idée que les décideurs se font de l’influence des médias. Des groupes peuvent comprendre qu’ils n’ont pas besoin des médias. Des groupes industriels ont des médias comme une danseuse. Un groupe médiatique (Murdoch, Time-Warner…), lui, fait de l’argent avec des médias, à condition de lui imposer les conditions de rentabilité qu’on applique à l’industrie. Aujourd’hui, les pratiques dans la communication sont exactement les mêmes que dans l’industrie : fusions entraînant licenciements, synergie… Ce n’est plus une industrie protégée comme faisant partie des acquis gagnés par la démocratie. Autrefois, c’était une sorte de pouvoir opposé aux pouvoirs obscurantistes, comme l’Eglise. Qui pense aujourd’hui que la presse c’est le contraire de l’Eglise ?
Plutôt que de disparaître, le journalisme n’est-il pas plutôt amené à muter ? Plutôt que transmettre l’information, à la lire et à la relier ?
Ignacio Ramonet : Le journalisme est un métier qui se transforme. Tout ce qui consiste à fuir dans l’instantanéité est apprécié par le public, mais quelle dimension de public ? Il faut accepter l’idée qu’on n’est pas obligatoirement un média de masse.
Certaines d’activités se pensent automatiquement comme devant être planétaires, permanentes, immédiates, immatérielles, ce que j’appelle le système 2p2i. Ce n’est peut-être pas nécessaire. Au moment où tout s’accélère, on a le droit de ralentir. C’est peut-être ce que demande une partie du public, un ralentissement, non pas par paresse mais pour prendre le temps de réfléchir. Le paradoxe est qu’on vit dans une société les plus cultivées de l’histoire de ce pays. C’est la même chose pour l’immense majorité des pays du monde. Jamais il n’y a eu autant de populations scolarisées, jamais il n’y a eu autant de diplômés dans toutes les disciplines. Pourquoi dans le même temps avons-nous les médias les plus médiocres ?
Une partie du public cherche un autre type d’information. Je pense par exemple qu’il y a beaucoup d’avenir, un vivier de production journalistique, pour tout ce qui est l’information sur l’information. La communication au sens large nous opprime tellement que quand on lit un livre comme celui de Serge Halimi [3], quand on regarde une émission de Schneidermann qui démonte un bidonnage ou un trucage, on est libéré, on se dit « ce texte ou cette émission me venge ». Parce qu’on m’a trompé, pendant très longtemps, et que je ne peux pas me défendre. Pourquoi a-t-on créé tant de médiateurs ? D’ici dix ans il n’y aura pas un média sans médiateur, il faudra donc réfléchir à la fonction des médiateurs. Qui surveille les médiateurs ?
La crédibilité s’est effondrée, comme un régime qui n’est plus cru. Aujourd’hui la démocratie médiatique ne fonctionne pas.
Dans l’audiovisuel on peut distinguer trois phases historiques de la crédibilité.
1. Les actualités cinématographiques fonctionnaient sur le principe du documentaire à commentaire. Un commentaire est pléonastique par rapport aux images que chacun voit : » le maréchal Pétain est en train d’inaugurer » et on voit Pétain en train d’inaugurer. J’ai pris l’exemple de Pétain mais dans les régimes démocratiques c’était la même chose. On croit parce que la voix qui nous parle est anonyme. C’est la voix d’une allégorie, c’est la voix de l’information. Elle pénètre en moi, c’est la voix de Jeanne d’Arc, elle a une fonction théologique, la divinité information.
2. Le journal télévisé. C’est le contraire : la voix anonyme laisse la place à la suridentification. C’est un monsieur ou une dame qui nous parle les yeux dans les yeux, on nous dit qui il est en sous-titre. Je le connais très bien parce que les journaux spécialisés nous racontent sa vie. D’ailleurs les enquêtes montrent qu’on choisit de voir tel ou tel journal télévisé en fonction du dégré de sympathie qu’on a avec le présentateur ou la présentatrice. C’est donc parce que j’ai un rapport d’intimité avec le présentateur ou la présentatrice que je crois ou je ne crois pas, parce que je me dis lui qui vient chez moi depuis dix ans ? vingt ans ? il ne peut pas me mentir. Il me dit qu’il parle avec Castro, je le crois ? ! [Rires dans l’assistance]. Mais, aujourd’hui, il y a la troisème phase, parce que ça ne marche plus. Poivre d’Arvor, dès qu’il me regarde, on se dit quel hypocrite. Il ose encore me regarder après ce qu’il a fait… ?
3. Aujourd’hui on croit CNN alors qu’elle ne me dit rien. On la croit parce qu’on a à faire à une sacrée machine technologique. Cette machine m’en met littéralement plein les yeux, elle dit « maintenant nous allons nous connecter avec Dhahran », et on voit Dhahran, « nous allons connecter avec Jerusalem », et on voit Jérusalem, et Washington, etc. On se dit : cette machine-là, qui a des caméras partout, qui a la puissance d’ubiquité de Dieu, il est évident qu’elle dit la vérité, on est obligé de la croire.
Donc, en quarante ans, on est passé par trois formes de crédibilisation, ce qui prouve que des crédibilités s’effondrent, et aujourd’hui nous sommes devant l’effondrement massif de la crédibilité des médias, parce qu’il n’ont pas changé de registre. Et c’est pourquoi les journaux télévisés vont disparaître tels qu’ils existent, et ils disparaissent déjà, remplacés par des chaînes d’information continue.
Quelle est la marge de manoeuvre du Monde diplomatique par rapport au groupe Le Monde ?
Ignacio Ramonet : Le Monde diplomatique fait partie du Groupe Le Monde. Le Monde est le seul grand journal qui appartienne majoritairement à son personnel et à ses lecteurs. C’est donc au sens propre du terme un journal indépendant. Il est l’actionnaire majoritaire du Monde diplomatique SA.
Actuellement Le Monde possède 57 à 58 % du capital, le reste est détenu à peu près à parts égales par le personnel du Monde diplomatique et par les lecteurs regroupés dans l’association des Amis du Monde diplomatique. Le personnel et les lecteurs ont une minorité de blocage, c’est-à-dire que si Le Monde venait à perdre son indépendance, s’il était racheté par un grand groupe, il aurait beaucoup de difficultés pour intervenir sur la ligne du journal, qui est protégée par ses statuts. Ils protègent en particulier la nomination du directeur, qui est le garant de la ligne.Nous sommes un journal très indépendant. Le contenu du journal est décidé en comité de rédaction sans influence d’aucun ordre, ni politique, ni confessionnel, ni industriel. Chacun des membres du comité de rédaction a ses convictions. Mais il n’y a pas de militant de parti politique chez nous. Ce n’est pas interdit mais ça n’existe pas. Nos relations avec Le Monde sont bonnes. Nous sommes des journaux différents. mais nous avons été fondés par la même personne, Hubert Beuve-Méry, un homme unanimement respecté par les journalistes, et qui a toujours voulu que Le Monde diplomatique ait sa propre personnalité, sa propre singularité. Ces relations ont connu des hauts et des bas, elles n’ont jamais été déplorables ou détestables, et en tout cas, avec la direction actuelle, du point de vue des entreprises, c’est une très bonne relation. C’est d’ailleurs la direction actuelle qui a encouragé la création de cette filiale que nous sommes aujourd’hui.
Mais ce sont des journaux très différents. Le Monde prend position sur mille et une questions, revient en arrière après avoir affirmé une chose, donne la parole à d’autres qui disent le contraire. De notre côté, nous sommes davantage partisans d’un journalisme non pas de débat au sens facile du terme mais d’un journalisme de conviction, on ne sacrifie pas à des formules faciles qui viennent du journalisme oral, par exemple il n’y a pas d’entretien. On a plus de temps, notre journal se lit sur un mois. Certains lecteurs dramatisent excessivement les différences, en réalité les relations sont bonnes.
Est-ce que vous n’êtes pas rattrapés par les grands groupes ? Le Monde Interactif est passé dans le giron de Grolier, et donc de Hachette (marchand d’armes).
Ignacio Ramonet : Le Monde possède les deux tiers du capital du Monde Interactif, il est majoritaire et compte le rester. L’objectif du Monde interactif est de se tenir très au courant, d’avancer en fonction des transformations qui se produisent. Le Monde diplomatique réfléchit ( je vous le dit en primeur ) à la possibilité d’entrer dans le capital du Monde interactif, à un petit niveau ( car les investissements sont très importants en la matière ), et également dans cet objectif. Je vous rappelle que nous avons été le premier journal de France à créer un site Internet.
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[1] La rédaction de Newsweek disposait des premiers éléments d’information sur l’affaire mais elle avait décidé de ne pas les publier immédiatement pour se laisser le temps de les vérifier. Matt Drudge a récupéré ces informations et les a publiées sur son site Internet (note d’Acrimed).
[2] TF1, un pouvoir, Pierre Péan, Fayard, 1997.
[3] Serge Halimi, Les nouveaux chiens de garde, ed. Liber Raisons d’agir, 1997.
« Bévues de presse »,
de Jean-Pierre Tailleur : une critique qui substituerait à d’autres ?
Paru dans « Le Monde Diplomatique » de juillet 2002
Les » maladies dédaignées du journalisme français « .
« Rares » sont les ouvrages qui s’attardent sur la » qualité » de la presse française, notamment quand elle se prévaut de ses enquêtes. C’est un tel travail d’investigation qu’effectue Jean-Pierre Tailleur [1], en prenant pour objet la presse elle-même : des enquêtes faussées des » grandes institutions » aux reportages minimalistes ou bâclés des quotidiens régionaux. Cet inventaire empirique, conforté par une comparaison internationale avec la presse espagnole et la presse anglo-saxone, permet à l’auteur de diagnostiquer avec précision certaines des » maladies dédaignées du journalisme français « . Ce dédain explique à ses yeux l’insuffisance des thérapies proposées – qu’il s’agisse, par exemple, du » métajournalisme » pratiqué par les » médiateurs « , des émissions sur les médias ou du rôle des instances corporatives. Mais le sombre constat des » bévues » vaut-il vraiment comme une critique qui substituerait à d’autres ? Le » maljournalisme » à la française n’est peut-être que la version française des effets de la marchandisation de l’information et du prêt-à-penser qui lui correspond.
Henri Maler
26/07/2004
Jean Pierre Tailleur : l’interview
Une interview de Jean-Pierre Tailleur, dont ses enquêtes ont été publiées dans des journaux très divers. Auteur d’un brillant essai sur le » maljournalisme » français, Bévues de presse , ce journaliste y explore le déclin français à travers ses principaux symptômes: la qualité contrastée du journalisme en France, voire la sous-information.
Le Grain de sable: Vous venez d’écrire un ouvrage très critique sur le journalisme en France ; que reprochez-vous le plus aux journalistes?
Jean-Pierre Tailleur: D’une part, des autocritiques inexistantes ou biaisées, et d’autre part, des critères de qualité des reportages trop souvent nébuleux. L’introspection des médias, lorsqu’elle existe, se limite à des considérations générales qui minimisent la responsabilité individuelle des journalistes. On évite la critique factuelle en se focalisant par exemple sur la pression économique que connaît cette profession, comme toutes les autres. Un peu comme si au lieu de juger les plats, les traqueurs de malbouffe que sont les chroniqueurs gastronomiques ne s’intéressaient qu’aux contraintes commerciales de la restauration. Je m’étonne, aussi, que des reporters extrêmement médiocres travaillent dans des rédactions prestigieuses et soient même encensés, parfois, sans que cela ne fasse débat.
LGDS: Le «maljournalisme» français n’est-il pas dû au manque de pluralité de nos journaux?
JPT : Oui, bien sûr. Serge Halimi l’a souligné justement dans son pamphlet «Les nouveaux chiens de garde». Mais avant de chercher les causes du maljournalisme, il faut juger sur pièce les journaux. Regardez ce qui se passe dans l’Aude, où
La Dépêche du Midi est en concurrence avec Le Midi Libre et L’Indépendant, tous deux contrôlés par Le Monde. On ne peut pas dire que les Narbonnais soient mieux informés sur les enjeux démocratiques locaux, que dans les habitants des villes de province où domine un seul journal.
LGDS : Vous attaquez particulièrement la médiocrité de la presse quotidienne régionale (PQR); est-ce un cas typiquement français?
JPT : Il n’y a aucune étude scientifique qui puisse permettre de répondre catégoriquement à cette question. Mais une comparaison internationale – terrain non exploré par nos «médiologues» – permet de constater que notre PQR est relativement mauvaise. Notre jacobinisme n’est pas la seule cause de ce sous-développement: les directions de ces journaux ne s’intéressent pas assez au contenu éditorial et à la hiérarchisation des informations locales.
Q : Quelles ont été les réactions de vos confrères à la sortie de ce livre?
JPT : Pour résumer en deux mots, corporatisme et couardise, y compris de la part des écoles de journalisme. A quelques exceptions près comme Le Point, Le Monde diplomatique ou France Culture. Mon éditeur a envoyé cet essai, qui est très argumenté, à plus de 200 journalistes. Mais ils ont refusé d’en débattre, en très grande majorité. Ils ont préféré s’intéresser plutôt au livre de Thierry Meyssan, qui soutient qu’il n’y a pas eu d’avion sur le Pentagone le 11 septembre 2001… Le contenu de «Bévues de presse» est pourtant au cœur des discussions sur la coupure entre l’élite et le peuple, dont on nous a tant parlé avec le «raffarinisme». Si quelques personnalités m’ont félicité, en privé, beaucoup de confrères journalistes m’ont tenu des propos du genre «De quel droit vous nous critiquez et donnez des leçons?». Comme si la dénonciation des moutons noirs de leur profession était un crime!
Q : La revue Marianne a réalisé un sondage démontrant que la majorité des journalistes votent à gauche. Que pensez-vous de ce sondage ?
JPT : Il est intéressant, bien qu’il ait été basé sur un échantillon très réduit d’une centaine de réponses si je me souviens bien. Mais il s’agit d’un faux problème, qui permet de cantonner l’autocritique de la presse dans un débat idéologique, type «pensée unique contre antilibéralisme». J’attends que les médias écrivent sur les journaux à travers le prisme du professionnalisme des reporters. Marianne, dont beaucoup de reportages respirent l’à peu près, serait alors obligé de reconnaître ses faiblesses.
Q : Un journaliste doit-il s’engager ?
JPT : Oui, s’il est éditorialiste et si sa plume est principalement le fruit de sa matière grise. Non, s’il fait du reportage de terrain, l’activité qui contribue le plus à la valeur ajoutée des journaux. Sa seule préoccupation doit alors être de multiplier les sources, et de rapporter honnêtement les informations recueillies dans les documents et chez les informateurs sollicités.
Q : Que pensez-vous de la presse satirique ou alternative tels que Charlie-Hebdo, PLPL ou Le Canard Enchaîné?
JPT : Ces journaux jouent un rôle qu’il ne faut pas négliger. Si l’on met de côté son ton sarcastique, «Pour Lire Pas Lu» a par exemple l’énorme mérite de dénoncer régulièrement la petitesse de certains grands médias. Mais comme je l’ai montré dans mon livre, «Le Canard» n’a pas la rigueur et la fiabilité que l’on peut attendre du journal d’investigation qu’il prétend être.
LGDS : Y a-t-il des sujets que les médias n’osent pas couvrir ?
JPT : Oui, en premier lieu les fautes entièrement attribuables à des journalistes politiquement corrects. C’est pour cette raison que les questions soulevées dans mon livre sont largement ignorées. Je crois aussi qu’on a trop tardé à informer sur l’islamisme dans les banlieues françaises. Pour prendre un autre exemple, lié à mes origines argentines, je regrette que notre presse ait si peu expliqué les raisons pour lesquelles l’ancien dictateur Videla ou son collègue chilien Pinochet bénéficient encore d’un courant de soutien dans leur pays. Le journalisme, c’est aussi un combat contre le manichéisme.
Q : Quel est votre plus beau souvenir de journaliste ?
JPT : J’en ai plusieurs, mais j’en citerai un qui m’a aidé à être moins manichéen justement. Il s’agit d’un reportage sur les Juifs d’Iran, publié en 1999 dans «L’Événement du jeudi». J’avais beaucoup de préjugés sur l’antisémitisme des Ayatollahs, mais de mes propres yeux, j’ai vu que l’on peut pratiquer le judaïsme dans le pays chiite. Malgré l’hostilité contre Israël, les dirigeants iraniens font une distinction entre antisionisme et antisémitisme en effet. J’ai eu un gros regret, cependant, qui m’a incité à poursuivre l’étude qui a abouti à mon livre: L’Evénement a voulu faire un coup en titrant l’article «50000 juifs menacés de mort», alors que je racontais l’inverse!
LGDS : Quels sont vos références en matière de journalisme?
JPT: Le New York Times, le médiateur du quotidien espagnol El Paìs, les journalistes qui, comme Christophe de Ponfilly avec le Commandant Massoud, on fait des enquêtes de longue haleine. Je lis aussi, souvent, des bijoux de reportage dans des journaux comme L’Express, Le Nouvel observateur ou Le Monde.
LGDS : Comment voyez-vous l’avenir de la presse française ?
JPT : Je n’ai pas de réponse à cette question.
LGDS : Pensez vous qu’Internet puisse contribuer à améliorer la qualité du traitement de l’information ?
JPT : Oui, mais il ne faut pas que les sites Web servent à combler les trous noirs de l’actualité délaissés par les medias traditionnels. Il ne faut pas qu’Internet soit un diffuseur de vérités essentielles, mais peu reprises par les médias grands publics.
LGDS : Vous avez beaucoup parlé des points faibles de la presse française. Quels sont ses points forts?
JPT: La richesse de ses magazines télévisés ou écrits, la profondeur de beaucoup d’analystes. J’apprécie en particulier les débats d’idées publiés dans Libération ou Le Monde, l’émission «L’Esprit public» de Philippe Meyer sur France Culture, ou les reportages du mensuel «Capital» ou du magazine télé homonyme. Leur niveau de pertinence a probablement peu d’équivalents dans le monde.
LGDS: Selon vous, est-on mieux informé qu’il y a 30 ans?
JPT: J’étais trop jeune, à l’époque du président Pompidou, pour pouvoir apprécier la qualité des informations. Mais je viens de lire un essai sur la presse écrite de Daniel Toscan du Plantier, publié en 1974: il faisait déjà certains des constats présentés dans «Bévues de presse»! Il y a certainement eu beaucoup de progrès, depuis, ne serait-ce que grâce à la multiplication des radios et des chaînes de télévision.
LGDS : Quelles mesures éventuelles faudrait-il prendre pour améliorer le journalisme français?
JPT : Avant de demander des aides, il faut balayer chez soi. Les journalistes doivent inviter la minorité de mauvais reporters qui squattent colonnes de journaux et temps d’antenne à changer de métier! Tant que la profession refusera de débattre du manque de professionnalisme dans ses rangs, les discussions sur les moyens de l’améliorer resteront vaines.
Jean-Pierre Tailleur, Bévues de presse: l’information aux yeux bandés, Félin (2002
Pour découvrir et acheter ce livre, cliquez ici
Le site : Bévues de presse
Ardisson, Kieffer et Routier : ils ont tué le journalisme
Qu’est-ce qu’il y a de pire que le maljournalisme, dénoncé entre autres et avec brio par Jean-Pierre Tailleur ?
C’est dénoncer le maljournalisme, pour cacher ses propres errements de journaliste.
J’ai analysé cette technique de communication, appelée « se cacher dans la lumière », dans mon livre « Ils ont tué la télé publique« , car Thierry Ardisson en a usé et abusé pendant des années au sein du service public.C’est une technique très subtile, et quasiment indétectable : comment se douter que la personne qui dénonce le plus un errement en est lui-même / elle-même la première supportrice ?
Pour Ardisson, j’explique comment il a tant et plus parlé du plagiat de Pondichéry pour mieux cacher qu’il mentait à son sujet, en minorant son ampleur. J’explique aussi qu’il dit qu’il respecte les noirs, les homosexuels, les femmes, les juifs, entre autres, alors qu’il adopte par ailleurs des attitudes qui pourraient faire penser le contraire. C’est tout un art, le fait de se cacher dans la lumière.Or Ardisson a trouvé un excellent élève en la personne de Philippe Kieffer, qui se prétend journaliste.
Parce qu’il aurait passé douze ans à Libération, au service « médias », il en serait forcément un.
Il oublie qu’on juge un journaliste sur les faits, or ceux-ci ont plutôt tendance à démontrer le contraire pour ce qui est de Kieffer. Celui qui n’a a priori aucun lien avec Tina (qui fut un temps dans l’équipe de Frou-frou, émission produite par Ardisson) avait accepté en 2003, à la demande d’Ardisson, de devenir l’intervieweur attitré, pour ne pas dire nègre officiel, pour son livre de souvenirs « Confessions d’un baby-boomer » (qui ressort ces jours-ci en poche). Ardisson était sans doute trop pris par le montage de ses émissions pour avoir le temps d’écrire des souvenirs de sa pauvre vie.
En fait, Kieffer a servi de faire-valoir à l’homme en noir, qui ne demandait que ça comme je le démontre dans le livre. Kieffer a avalé les pires couleuvres de l’ex-pape du PAF, des 6 pages de Pondichéry à ses mensonges sur Thierry Meyssan (écrivant lui-même ce qu’Ardisson n’a même pas pu avouer, et qui en plus est faux : Meyssan n’était pas un dérapage, son interview était planifiée, préparée la plus scrupuleusement possible, et Ardisson, tout en reconnaissant que c’était « la plus grossière erreur de sa vie », cachait dans la lumière le fait qu’il avait bien entendu fait exprès de l’inviter et de lui dérouler le tapis rouge), etc.
On apprend dans l’Express du 8 juin 2006 que Philippe Kieffer, nègre de luxe donc, « s’est attelé au tournage d’un documentaire sur la crise de la presse française. » Il fallait oser : l’un de ceux qui participent à cette crise, en ne posant même pas à Ardisson les questions élémentaires que tout journaliste digne de ce nom aurait dû poser, en n’enquêtant même pas un minimum sur les assertions de son interviewé de luxe, l’un des pires journalistes donc va se charger de nous dire, à nous pauvres téléspectateurs, pourquoi la presse est en crise. C’est la même chose qu’Airy Routier qui, dans un dossier du Nouvel Observateur consacré au maljournalisme, se plagiait lui-même 4 ans avant, dans ce même Nouvel Observateur.En dénonçant, j’éloigne la critique, et je deviens le chevalier blanc. Ardisson, Kieffer et Routier l’ont bien compris, malheureusement ils ne sont pas les seuls en France aujourd’hui, il suffit de s’intéresser aux médias pour le savoir, et nul besoin de regarder le futur documentaire fait par l’un des fossoyeurs de la presse sur la crise la presse pour le comprendre.
« Ravi » de mieux nous connaître
Par leravi – 1er/07/2004
Décidemment le « mensuel provençal et satirique » ne fait rien comme les autres. Au Ravi, qui souffle sa première bougie cet été, tous les rédacteurs sont invités à exprimer haut et fort leur point de vue. Parfois, lorsqu’ils suivent des études, ils consacrent même un mémoire de sociologie à notre journal. En voici une courte synthèse.
« Fort du parti pris du rire, on tient bon le cap : celui d’une presse libre, résolument critique, ni complaisante ni cynique », écrivait le Ravi dans son édito de janvier 2004. Parler de presse “indépendante” ou de médias « libres » implique que les médias dits dominants ne seraient ni libres ni indépendants. De fait, de nombreuses pratiques contestables en matière d’information ont été dénoncées en France, en Italie, aux Etats-Unis, qui mettent à mal une réelle expression de la démocratie. Cependant, la situation de la liberté de l’information dans ces pays reste toujours fort enviée par leurs confrères de pays plus répressifs. Selon le rapport 2003 de Reporters Sans Frontière, 25 journalistes ont été tués en 2002, près de 400 médias ont été censurés et 121 journalistes se trouvaient en prison. Dans les pays dits « en transition », les experts de
la Banque mondiale soulignent que « la “bonne gouvernance” d’un pays requiert l’existence de contre-pouvoirs. Une presse indépendante est l’un de ces nécessaires contre-pouvoirs » (2). Des pays comme
la France souffrent plus d’un « maljournalisme » (3) que d’une éventuelle mort du 4e pouvoir.
Pour autant, ce maljournalisme justifie pleinement l’existence d’un contre-pouvoir sous la forme de médias (revues, « webzine », télévisions, radios) qui se revendiquent libres et indépendants, en opposition aux médias dits « dominants ». « Médias qui dominent à double titre : par la place qu’ils occupent et par la fonction qu’ils remplissent. Et à ce double titre, médias de la domination. » (4) Lesquels, de plus en plus soumis aux exigences du marché, au diktat de l’audimat, appartenant souvent à de grands groupes financiers, acteurs parfois inconscients d’un mécanisme de domination qui les dépassent, ne remplissent effectivement pas toujours ce rôle d’agents de la démocratie. Dans le contexte local, où l’on parle aussi à juste titre de « gouvernance », un journal libre comme le Ravi, « qui prend la parole plus qu’il ne milite » (5) peut être ce nécessaire contre-pouvoir. Même si c’est un peu prétentieux, faut bien se motiver pour quelque chose…
« Le rire est la meilleure arme contre les pisse-froids » écrivait encore le Ravi, en juillet 2003. Parce que la sociologie sans le rire, ça peut vite devenir pénible. Comme disait Bourdieu, la sociologie c’est bien pratique pour « minimiser la violence symbolique qui s’exerce dans les rapports sociaux et en particulier dans les rapports de communication médiatique » (6). Mais quand même, faut pas pousser : « le travail critique… ne déroge en rien aux exigences de la rigueur et de la précision parce qu’il recourt à l’humour et au trait satirique », précise Patrick Champagne, l’un de ses disciples. Mieux comprendre les manipulations permet de mieux les énoncer, même en riant. Au Ravi, on ne peut nier l’aspect « rire et sociologie ». L’avantage pour le lectorat, c’est que les médias dominants manquent des deux. Souffrant d’une très dommageable « ignorance sociologique » (7), flagrante par exemple sur le cas de la délinquance juvénile ou de l’urbanisme, ces médias nous infligent en outre un sérieux mélodramatique sans compétence qui ne sert de fait plus à rien. Autant en rire. Et travailler. Car les journalistes incompétents laissent un sacré travail à qui se piquerait de vérifier le leur. Sur le sujet, il ne faut pas hésiter à jeter un coup d’oeil à PLPL, efficace décortiqueur de « conneries » médiatiques, et lire régulièrement son Ravi…
Combien de temps peut durer une pareille histoire ? Tout dépend des lecteurs et d’éventuels procès… Les journaux comme le Ravi ont en effet un délicat talon d’Achille : un effarant manque d’argent. Une survie précaire qui arrange bien ceux que l’existence d’une telle presse irrite. Comme le soulignait le Monde diplomatique, en juin 2004, « les procès sont devenus un moyen courant pour tenter d’intimider les animateurs souvent bénévoles, de projets rédactionnels un peu dérangeants ». Ainsi, après le Fakir, poursuivi par Le Courrier Picard, après CQFD, poursuivi par
la Croix-Rouge, c’est au tour d’un nouveau journal parisien, Tant pis pour vous, de subir un procès à propos d’un article corrosif sur le chanteur Renaud. Quant au Ravi, il vient juste d’être mis en examen dans le cadre d’un procès en diffamation l’opposant à la mairie de Menton (lire page 4 et l’édito)…
Valérie Patte
(1) Petit manuel de l’observatoire critique des médias, supplément à PLPL. (2) Reporters sans Frontières, rapport 2003. (3) Acrimed (Observatoire critique des médias), www.acrimed.org. (4) Jean-Pierre Tailleur , Bévues de presse, éd. du Félin. (5) Gilles Mortreux, journaliste au Ravi. (6) Pierre Bourdieu, Sur la télévision, Libre raisons d’agir, 1996. (7) L’expression est de Loïc Wacquant, autre disciple de Bourdieu.
Génération « altermédias »
Dans les années 80, Jello Biafra, chanteur du groupe punk Dead Kennedy’s lançait son mot d’ordre : « Don’t hate the media, become the media », mais il n’a pas pensé à nous proposer un nom. La terminologie de la presse « libre » pose effectivement un problème. Par définition, toute la presse est libre et indépendante. On sait ce qu’il en est dans les faits, mais quand même. Presse d’opinion, ça ne va pas non plus, le Ravi par exemple représentant plutôt une presse d’opinions, avec un “s”. Presse « alternative », c’est sympa mais un peu trop rock’n roll. Presse de « proximité », c’est pas mal, mais le magazine mensuel municipal est aussi de proximité. Reste l’intéressant « altermédia », utilisé surtout à l’étranger, qui présente le double avantage de regrouper en un seul terme les éléments disparates de la presse « différente » et de souligner dans le même temps le lien entre le développement rapide de cette presse et l’émergence du mouvement altermondialiste. « Le système indépendant de communication est déjà très répandu et très actif. A tel point qu’en Italie par exemple, des évènements comme ceux de Gênes ou du Forum social de Florence ne pourraient pas être autrement expliqués. » (P. Sullo, rédacteur en chef de Carla, revue italienne indépendante, novembre 2003.)
Le grand bazar de l’info Yves Agnès
Un livre de plus sur les média. Un livre de trop ! Yves Agnès a eu le toupet de sous-titrer ce livre « Pour en finir avec le maljournalisme » Maljournalisme : un mot emprunté à Jean-Pierre Tailleur , qu’il omet de signaler, auteur d’un des plus brillants ouvrages sur la presse française Bévues de presse. Assez étonnant car il explique par ailleurs d’où provient le terme malinformation.
Son constat sur les médias sonne comme une rengaine usée : « Les bavures médiatiques se sont banalisées », « La vérification des informations est aujourd’hui de moins en moins pratiquée »…
Yves Agnès souligne qu’« on peut à l’inverse se réjouir de la prudence et de la modération dont ont fait preuve les médias écrits et audiovisuels après les incidents survenus lors de la manifestation lycéenne du 8 mars 2005 ». Les médias ne se sont pas emballés sur le » racisme anti-blancs » « pouvant donner du grain à moudre à une extrême droite ». C’est sans doute pour cela que les médias français ont fait preuve d’une très grande retenue vis à vis des dernières émeutes en banlieue. Les média français se sont bien auto-censurés comme le confirme Jean-Claude Dassier, le directeur général de LCI dans The Gardian qui a admis avoir volontairement censuré la couverture des émeutes de banlieues, et ce afin de « ne pas favoriser l’extrême droite ».
Yves Agnès a l’air d’être réticent vis à vis d’Internet , repère de « pédophiles, maquereaux, racistes ou négationnistes ». Il note que 10 000 dépêches d’agences sont produites chaque jour. Pourtant il omet de signaler que les médias français répercutent les mêmes informations. C’est ici qu’Internet est intéressant car il permet de signaler des informations passées inaperçues comme les nombreux actes de vandalismes visant des églises, temples ou cimetières chrétiens (voir le site indignations.org).
Deux églises ont été attaquées lors des émeutes pendant la nuit du 6 novembre 2005. De nombreux médias étrangers s’en font l’écho mais étrangement
la presse nationale – télévisions, radios et journaux – reste muette.
Un autre point positif d’Internet que cet auteur a oublié : les débats grâce aux nombreux sites sur la toile à propos du traité constitutionnel européen.
Yves Agnès s’inquiète de l’omniprésence des patrons de grosses société dans la presse écrite et audiovisuelle. C’est un problème mineur ; d’ailleurs les groupes TF1 et Lagardère sont entrés dans le capital de l’Humanité sans que la ligne éditoriale infléchisse.
Face à ces médias classiques, il propose des sites militants proche du milieu alter-mondialiste et donc très subjectifs comme Uzine, Acrimed…Il fait aussi l’éloge d’Ignacio Ramonet qui n’a jamais eu de scrupules à se présenter avec Fidel Castro que je considère plutôt comme un dictateur.
A la lecture de ce livre on ressent un profond malaise : les journalistes sont tès politiquement correct, ils ne sont pas prêt à combattre la censure qui sévit en France.
J’oubliais : Yves Agnès a été rédacteur en chef au Monde, et directeur général du Centre de formation et de perfectionnement des journalistes (CFPJ)
Nos liens
Médias, observation des médias, recherches universitaires, blogs de journalistes, collectifs et associations…
Sites de grands médias
Le Figaro
Quotidien généraliste de couleur « droite libérale »Le Parisien
Quotidien dit « populaire » à déclinaison locale (le Parisien/Aujourd’hui en France) La Croix
Quotidien généraliste de couleur « démocrate chrétien ». Nouvelle formule depuis le 20 novembre 2006.Le Monde
Quotidien généraliste dit « de référence » de couleur « centre-gauche »Libération
Quotidien généraliste de couleur « nouvelle gauche »
l’Humanité
Quotidien généraliste communiste 20minutes
Quotidien gratuit
Métro
Quotidien gratuitOuest France
Quotidien régional
Le Télégramme de Brest
Observation des médias
L’actu des médias
Un site d’étudiants en journalisme à l’IUT de Bordeaux qui traite, comme son nom l’indique, de l’actualité des médias.
Acrimed
Le site de référence de la critique bourdieusienne des médias. Indymédia
Portail de référence du journalisme indépendant et altermondialiste.
Bigbangblog
Le blog d’une partie de l’équipe d’Arrêt sur images.
David Abiker fût l’invité du septièmeCafé de l’info de juin 2006. Daniel Schneidermann fût notre invité du 3 octobre 2006.maljournalisme
Site de Jean-Pierre Tailleur, auteur de Bévues de Presse : l’information aux yeux bandés et inventeur du concept de maljournalisme. Il a également été notre invité du Café de l’info en 2 mai 2006 sur le thème : La presse étrangère est-elle de meilleure qualité que la presse française ?
Media-ratings
Agence de notation des médias. Nous avons reçu son directeur, Philippe Karsenty, lors de notre Café de l’info du 3 janvier 2006, autour du thème : peut-on noter les médias ?
Le dernier pouvoir
Site web mettant à disposition quelques émissions parmi les plus marquantes du Premier Pouvoir d’Elisabeth Lévy. Ce site a été mis en place par des auditeurs de France Culture après la décision de David Kessler de supprimmer cette émission cet été.
Autour des médias
L’OJD
L’OJD est l’organisme de référence pour la certification des chiffres de tirage, de diffusion et de distribution de la presse française. L’OJD certifie également la fréquentation des sites Internet.
Commission de la Carte de Presse
Créée par la loi du 29 Mars 1935,
la Commission a pour objet de délivrer une carte d’identité de journaliste professionnel aux postulants qui remplissent les conditions fixées par cette même loi (notamment dans son article L 761-2). Thomas Zlowodzki
La nouvelle émission politique de TF1 signe la faillite
du journalisme à la française
Mis en ligne le 16 février 2007
TF1 a diffusé sa nouvelle émission politique « J’ai une question à vous poser », présentée par Patrick Poivre d’Arvor, le 5 février 2007. Les candidats à l’élection présidentielle y sont interrogés, en direct, pendant deux heures par cent Français sélectionnés par l’institut d’étude d’opinion TNS-SOFRES.
Cette émission a provoqué de nombreuses polémiques. Nicolas Sarkozy, qui était l’invité du premier numéro de cette émission, entretient de bonnes relations avec Dominique Ambiel. Or, ce dernier dirige la société A Prime qui produit ce programme. M. Ambiel est également l’ancien collaborateur de Jean-Pierre Raffarin qui lui-même soutient le président de l’UMP.
Nous n’avons pas les moyens de vérifier si ces critiques sont pertinentes. A savoir, si les questions posées par les Français au président de l’UMP lui ont été communiquées au préalable. En revanche, Media-Ratings trouve choquant que les deux candidats en tête dans les sondages, Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal, bénéficient, durant leur campagne d’émissions qui leurs sont entièrement consacrées tandis que les autres candidats doivent partager leur temps de parole. Néanmoins, il apparaît que ce type d’émission annonce la faillite du journalisme politique à la française, fait de connivences, de coucheries et compromissions. En observant le paysage journalistique français, à cette veille d’élection présidentielle, on constate que deux présentatrices continuent à travailler jusqu’à la limite de la décence. Elles partagent leur vie avec deux membres du gouvernement actuel. Pour l’une d’elles, c’est la révélation de cette liaison par les médias, et non la liaison elle-même, qui a donné lieu à son retrait futur de l’antenne. De plus, si les medias français avaient moins de pudeur et révélaient les relations qui unissent certains journalistes à des postes de haute responsabilité avec le personnel politique, les rédactions de certaines chaînes et autres médias seraient décimées. De plus, aux liens intimes s’ajoutent les liens amicaux qui lient certains politiques français à de nombreux journalistes français.
Comment peuvent-ils ensuite poser les questions qui fâchent ? Ces journalistes se voient alors contraints de déléguer cette fonction à des Français anonymes issus de panels de sondeurs. Prenons l’exemple des liens qui unissent le porte-parole du gouvernement, Jean-François Copé, au groupe France Télévisions. Deux proches collaborateurs de M. Copé, Bastien Millot et Damien Cuier, ont été nommés à des postes de direction au sein du groupe de télévision publique. Libération avait publié un très bon article à ce sujet. En voici un extrait :
« Mais c’est la filière Copé qui fait jaser. Quelques jours à peine après son élection, Carolis s’est trouvé un directeur de cabinet en la personne de Damien Cuier, issu du cabinet du porte-parole du gouvernement et ministre délégué au Budget. A l’ANPE-Copé, Carolis recrute aussi Bastien Millot. A 33 ans, ce jeune homme (qui a connu le ministre à Sciences-Po comme prof avant de devenir le directeur adjoint de son cabinet) réalise son rêve : entrer à la télé. C’est Millot qui habitait l’appartement personnel de Copé, alors que celui-ci occupait un dispendieux logement de fonction. Plus grave, Millot a été condamné fin 2004, alors qu’il était adjoint au maire de Beauvais, à une amende de plus de 30 000 euros ¬ toujours pas réglée ¬ pour « faux en écriture publique et abus de fonction » : des heures supplémentaires indues à un chauffeur de la ville. Mais tout ça, c’est du passé, jure Millot, bombardé « directeur délégué en charge de la stratégie, de l’innovation et de la communication », directement sous les ordres de Carolis. Le poste lui permet d’avoir l’oeil sur les programmes, et ce, sans aucune expérience télévisuelle ! Enfin, l’entourage de Sarkozy l’accuse d’être le rédacteur des argumentaires anti-Sarko, pour le compte de
la Chiraquie. Millot dément. Comme il dément avoir fait circuler la photo d’un certain Richard Attias, « l’ami » de Cécilia Sarkozy. » L’Humanité a aussi publié un excellent article sur ces nominations. En voici quelques lignes : « Plus inquiétant, après l’appel en tant que directeur de cabinet de Damien Cuier, membre du cabinet de Jean-François Copé au ministère du Budget, Patrick de Carolis pourrait, selon certaines sources, à nouveau puiser dans « le vivier » du porte-parole du gouvernement en s’assurant les services de Bastien Millot jusque-là directeur adjoint du cabinet du ministre délégué au Budget et à
la Réforme de l’État et connu pour avoir été l’occupant de l’appartement de 160 mètres carrés de Copé dans le 16e arrondissement de Paris. Bastien Millot a été directeur de cabinet de Copé à la mairie de Meaux. Le porte-parole du gouvernement semble placer ses amis avec application. » Pour illustrer la connivence qui existe entre le porte-parole du gouvernement à la directrice de l’information de France 2, Arlette Chabot, nous vous invitons à découvrir leur fameuse bise.
Pour conclure cette analyse sur les nouvelles émissions politiques, on observe que le service public suit la même pente populiste que TF1. En effet, cette connivence politiques-journalistes a aussi conduit France 2 à faire poser des questions d’« A vous de juger », par des internautes munis de webcam. Ainsi, cela permet à la chaîne de faire poser certaines questions délicates, sans avoir à se brouiller avec le politique interviewé. Notons toutefois que les relations entre les journalistes et les politiques n’étaient pas plus saines auparavant. Pour illustrer ce propos, il suffit de se remémorer l’interview de François Mitterrand par les femmes de deux de ses ministres, Anne Sinclair et Christine Ockrent. Envoyer
Pourquoi nous ne soutenons pas Charlie Hebdo Mis en ligne le 8 février 2007
Charlie Hebdo est poursuivi en diffamation par
la Ligue islamique mondiale,
la Mosquée de Paris et l’UOIF pour « injures publiques à l’égard d’un groupe de personnes en raison de leur religion » après avoir diffusé en février 2006, en plus d’un dessin de Cabu, les fameuses « caricatures de Mahomet » dont les manipulations ultérieures ont soulevé le monde musulman.
Le 17 février 2006, nous avions consacré une perle à cet épisode médiatique dans laquelle nous défendions vigoureusement le droit de diffuser ces caricatures : Caricatures danoises : l’intolérable manipulation face à l’inacceptable capitulation
Pour autant, même si nous ne soutenons absolument pas leurs adversaires, nous ne rangeons pas aux côtés de Charlie Hebdo car nous estimons que ce journal a publié ces caricatures pour faire un coup médiatique plus que pour défendre la liberté d’expression ou pour s’opposer à l’extrémisme musulman. En effet, après analyse du contenu de cet hebdomadaire, nous avons observé que Charlie Hebdo se moquait très souvent des chrétiens, rarement des juifs et quasiment jamais des musulmans, sauf dans le cas précité. De plus, on y observe une tendance régulière à la mise en équivalence des religions, quels que soient leurs agissements. Pour ce qui concerne les caricatures danoises, ce sont les dessinateurs danois qui ont pris tous les risques. La posture de Charlie Hebdo dans cette affaire n’était-elle alors pas plutôt destinée à réaliser un coup médiatique et à redresser des ventes en perdition ?
On notera l’unanimisme démagogique et suspect de tous les bien-pensants et des politiques qui se rejoignent pour défendre l’hebdomadaire attaqué. Il nous apparaît que ce procès est uniquement un événement médiatique destiné à aveugler le public et à faire croire que la liberté d’expression est défendue en France. En fait, cette dernière est bien plus menacée par la toute puissance et la connivence qui existent entre les groupes de communication privés et publics que par des organisations islamistes extrémistes. On observera que Charlie Hebdo n’a jamais osé affronter les véritables puissances médiatiques françaises. Alors, Charlie Hebdo, debout face à quelques islamistes déboussolés et, couché face à France Télévisions ?
Il est vrai que pour être invité sur leurs plateaux de télévision et y faire sa promotion, il vaut mieux être docile…
Bien évidemment, indépendamment de notre analyse du contenu régulier de Charlie Hebdo, nous espérons que les plaignants seront déboutés de leur plainte. Cela semble être en bonne voie puisque le Procureur de
la République a réclamé la relaxe de Charlie Hebdo. Cependant, rien n’est sûr car dans le procès qui nous a opposé à France 2 et Charles Enderlin, le Procureur avait demandé notre relaxe et nous avions été condamnés.
Pourquoi les medias entretiennent-ils le mythe que Jacques Chirac a
véritablement lutté contre l’antisémitisme ? Mis en ligne le 15 mars 2007
Jacques Chirac a annoncé le dimanche 11 mars 2007 qu’il ne se présenterait pas aux prochaines élections présidentielles françaises.
Au cours de son allocution, il a beaucoup insisté sur la lutte contre l’antisémitisme.
Dans son sillage, les médias français ont répété que le président aurait mené vigoureusement ce combat. Pourtant, ceux qui observent
la France avec recul savent que c’est sous sa présidence que, la première fois en France depuis la fin de
la Seconde Guerre mondiale, des synagogues ont été incendiées et que des juifs ont été assassinés en raison de leur religion. La mort d’Ilan Halimi en est le triste rappel. Jacques Chirac aurait-il alors échoué sur ce dossier par incompétence, comme sur d’autres tels que le chômage ou la « réduction de la fracture sociale » ? A moins que l’affirmation de son combat contre l’antisémitisme n’ait été qu’une posture ?
De nombreux observateurs ont longtemps été trompés par certains discours et réactions de Jacques Chirac. Ainsi, sur la scène intérieure française, Jacques Chirac a toujours combattu Jean-Marie Le Pen et l’extrême droite. En juillet 1995, il a reconnu la culpabilité de l’Etat français dans la déportation des juifs pendant la seconde guerre mondiale Pour autant, est-ce que ces attitudes justifient que l’on accorde à Jacques Chirac un brevet de « lutteur contre l’antisémitisme » ou de non-antisémitisme ? Nous ne le pensons pas, bien au contraire.
En effet, quand on analyse la carrière politique de Jacques Chirac sur la durée, on observe qu’il a eu comme alliés politiques les ennemis les plus déterminés et les plus dangereux du peuple juif ; notamment ceux qui ont promis de réaliser un nouvel holocauste. Jacques Chirac a même tenté de les aider à atteindre leurs objectifs. Par exemple, il a offert à Saddam Hussein les moyens de produire l’arme atomique en 1975 au travers de la centrale Osirak que certains appelaient « Ochirak ». Les Israéliens ont détruit cette centrale nucléaire en 1981. On n’ose imaginer comment aurait tourné la guerre du Golfe de janvier 1991 si Saddam Hussein avait possédé la bombe atomique. Jacques Chirac a aussi été l’ami du dictateur libyen Kadhafi jusqu’à que ce dernier se convertisse à la realpolitik et abandonne ses armes de destructions massives. Paradoxalement, Kadhafi s’affirmait comme le premier des sionistes. Il disait qu’il souhaitait que tous les juifs de la planète se réunissent en Israël afin de pouvoir les anéantir en une seule fois avec une arme atomique. Le président français a aussi protégé contre les sanctions internationales le président syrien défunt, Hafez El Assad, qui hébergeait à Damas de nombreux groupes terroristes décidés à détruire l’Etat d’Israël. Il en fut de même avec le Hezbollah libanais qui a longtemps été défendu par Jacques Chirac personnellement, et par les diplomates français sous ses ordres. Il s’est toujours opposé à ce que ce groupe soit placé sur la liste européenne des organisations terroristes alors qu’il est responsable, entre autres, de l’attentat du Drakkar qui a tué plus de 50 soldats français en 1983 à Beyrouth.
La diplomatie chiraquienne a aussi permis à l’Iran de gagner du temps ces trois dernières années pour parvenir à détenir l’arme nucléaire. En somme, il apparaît que sur la scène internationale, Jacques Chirac a été l’allié de tous ceux qui voulaient rayer de la carte l’Etat d’Israël et tuer tous ses occupants. Pour mémoire, rappelons aussi qu’il avait comme secrétaire général de l’Elysée, entre 1995 et 2002, Dominique de Villepin qu’il a nommé Premier ministre en 2005. Or, si les médias se sont offusqués de la volonté du président iranien de « rayer Israël de la carte », peu se sont souvenus que l’actuel premier ministre français expliquait en 2001 au directeur du Monde, Jean-Marie Colombani, qu’Israël était une parenthèse de l’histoire qui serait amenée à disparaître. Les anticipations de Villepin rejoignaient alors la volonté du président iranien. En fait, au fil du temps, il est apparu que l’amour des juifs de Jacques Chirac s’est concentré sur les seuls juifs morts ou affaiblis.
Toutefois, il a utilisé de nombreux collaborateurs juifs autour de lui car il avait besoin de leurs compétences. Ces derniers se sont comportés en collaborateurs inconditionnels du pouvoir qu’ils ont épaulé. En 2003, Jacques Chirac a voulu rétablir, notamment en Israël et aux Etats-Unis, sa réputation ternie par les images de synagogues brûlée. Il a essayé de faire croire que l’antisémitisme n’existait pas en France. Il a donc employé quelques juifs de cour pour organiser un voyage de journalistes israéliens à Paris, tous frais payés. Ces derniers se sont comportés comme leur mécène s’y attendait : ils sont rentrés chez eux en décrivant une France idyllique. Un peu à la manière de ceux qui visitaient l’URSS sous Staline à qui on ne montrait que des scènes de fictions fabriquées spécialement pour eux. Jacques Chirac a aussi créé ce qui est apparu comme son ministère aux affaires juives en 2003. Il l’a nommé « secrétariat d’Etat aux Droits des Victimes » car c’est ainsi qu’il aime voir les juifs. Et pour que son message soit bien compris, il l’a attribué à celle qu’il tenait pour la représentante des juifs de France, Nicole Guedj. Jacques Chirac est aussi un homme qui vit avec l’imaginaire de la première moitié du 20ème siècle. Il a ainsi été fortement marqué par l’idéologie que véhicule le Protocole des Sages de Sion. Ainsi, nombre de ses actions montrent qu’il est persuadé qu’une assemblée de juifs américains contrôle le monde. Tout en méprisant souverainement les représentants de la communauté juive française du CRIF, il a choyé les messagers des organisations juives américaines, chaque fois qu’ils venaient en France. A certains, il a offert des photos en sa présence à montrer à leurs généreux donateurs. A d’autres, plus craints, il a remis des décorations. Pour illustrer le mépris et la méfiance que Jacques Chirac entretenait à l’égard des juifs de France, rappelons que le discours que le président du CRIF devait prononcer chaque année à son dîner annuel devait être visé par les autorités françaises. Au regard de cette analyse, il nous semble évident que les éloges reçus par Jacques Chirac pour sa lutte contre l’antisémitisme ne sont pas mérités, bien au contraire.
Autre exemple accablant à mettre au bilan du président français : la couverture qu’il a offerte à France 2 pour perpétuer le mensonge au sujet de l’affaire Al Doura, qui est la plus grande incitation à la haine antisémite de ces dernières années.
Enfin, il est clair qu’après le départ de Jacques Chirac de l’Elysée, un assainissement sera nécessaire sur ce point, comme sur d’autres, afin de restaurer les institutions démocratiques.
Meurtre d’Ilan Halimi : Youssouf Fofana serait-il le responsable
idéal ? Mis en ligne le 9 mars 2006
Cet article est disponible en anglais : The Murder of Ilan Halimi : Is Youssouf Fofana the ideal culprit? Depuis la mort d’Ilan Halimi, les médias ont changé leurs versions des faits à de nombreuses reprises, suivant ainsi docilement les interprétations fournies par les autorités françaises.
Il semble toutefois que le traitement médiatique de ce crime ne permette pas d’en saisir l’importance et en dissimulent les vrais responsables.
Bien évidemment, loin de nous l’idée de disculper Youssouf Fofana et les membres de son gang : ils ont enlevé Ilan Halimi, l’ont torturé et l’ont abandonné mourant sur la voie publique. Personne ne naît raciste, antisémite ou antifrançais. Ces perversions s’apprennent et s’entretiennent. Ceux qui alimentent ces sentiments auront des comptes à rendre aux citoyens qui en sont aujourd’hui les victimes. Chacun prend aujourd’hui conscience que ces violences extrêmes peuvent frapper partout, et tout le monde. Ainsi, rappelons le lynchage de Jean-Claude Irvoas, en octobre 2005, devant sa femme et sa fille, alors qu’il photographiait du mobilier urbain en banlieue parisienne. Un crime antisémite
De nombreux médias ont longuement tergiversé afin d’éviter de reconnaître le caractère antisémite de ce crime.
Au regard de l’identité de la victime, des autres tentatives d’enlèvements qui visaient principalement des juifs ainsi que des informations recueillies auprès de la famille d’Ilan Halimi, il semble évident que ce crime est antisémite. Pour que les médias l’admettent, il aura fallu, d’une part, attendre la diffusion, le 20 février 2006, d’une interview de Mme Halimi dans le quotidien israélien Haaretz, article qui a provoqué la colère du Quai d’Orsay et d’autre part, que le procureur retienne comme circonstance aggravante l’antisémitisme. Dans une moindre mesure, ajoutons notre modeste contribution à l’éclosion de la vérité avec l’envoi de notre newsletter du 17 février. A ce stade de l’analyse, une première question se pose : pourquoi a-t-il fallu exercer des pressions extérieures pour que la vérité soit révélée ? Malgré ces informations concordantes, de nombreux médias ont tenté de minimiser le caractère raciste de ce crime. Ainsi, l’émission Arrêt sur Images du 5 mars 2006 a rassemblé un plateau inéquitable. En effet, le présentateur de l’émission, Daniel Schneidermann – qui avait minimisé le caractère antisémite de l’affaire dans Libération du 24 février 2006, a invité pour appuyer sa thèse un journaliste du Monde, Piotr Smolar ainsi qu’Esther Benbassa qui s’est illustrée dans L’Humanité du 22 février 2006 – « J’appelle à la prudence » – avant, sur le plateau de France 5, de parler de « ce bonhomme » pour évoquer Ilan Halimi.
Pour apporter la contradiction à ce trio, Arrêt sur images avait invité Michel Zerbib de Radio J. Notons un des arguments phares défendu par les tenants du crime crapuleux : puisque certains de ceux qui ont été menacés par les barbares n’étaient pas juifs, le meurtre d’Ilan Halimi n’était pas motivé par une haine antisémite. Très bien, alors, si nous suivons ce raisonnement, Hitler n’était pas antisémite puisque la grande majorité de ceux qu’il a tué n’étaient pas juifs… De leur côté, les médias internationaux n’ont pas eu la même pudeur pour qualifier l’évidence : le site de
la BBC a titré « Le chef du gang anti-juif arrêté » tandis qu’El Pais annonçait « Barbarie antisémite à Paris ». Pourquoi certains ont-ils voulu nier le caractère antisémite du crime ? Nier l’existence de l’antisémitisme en France est important pour la diplomatie française au moment où elle est contestée à l’étranger.
Or, notre diplomatie, mais aussi les principaux dirigeants politiques français fantasment sur le lobby juif mondial, censé influer la politique internationale, et basé selon eux aux Etats-Unis. C’est pour cela que les dirigeants politiques français reçoivent avec déférence, même s’ils les méprisent, certains dirigeants communautaires juifs américains.
Notons enfin que ce meurtre n’est pas, contrairement à ce que tout le monde affirme, le premier de ce genre en France. Ainsi, en novembre 2003, un jeune français de confession juive, Sébastien Sellam, avait été égorgé par son voisin, Adel, qui lui avait crevé les yeux et s’était exclamé : « J’ai tué mon juif, je vais aller au paradis ». Le meurtrier avait été placé en hôpital psychiatrique et devrait être libéré prochainement. A l’époque, les médias avaient dissimulé le caractère antisémite de ce crime. Le meurtre d’Ilan Halimi est aussi un crime antifrançais et antioccidental
Ce crime est antisémite, mais il est aussi antifrançais et antioccidental.
La volonté des kidnappeurs de faire subir à Ilan Halimi des tortures, ou lui faire revivre des scènes vues à la télévision dans le cadre des informations diffusées par les médias français concernant l’Irak, renvoie ce crime à une forme de vengeance absurde. Pourquoi les médias français s’échinent-ils à appeler « tortures » les traitements des prisonniers d’Abou Ghraib alors que ce ne sont que des humiliations, abjectes certes, mais juste des humiliations ? Ces dérapages sémantiques et ces fausses interprétations n’ont-ils pas donné des idées de revanche aux tortionnaires d’Ilan Halimi ? Les tortures et l’assassinat d’Ilan Halimi sont devenus acceptables pour certaines personnes abreuvées d’informations mensongères sur ce qui se passe en Irak, en Afghanistan, en Israël, mais aussi en France. La victimisation des musulmans, aidée en cela par la diffusion de fausses informations dans les médias, a déclenché une haine antifrançaise et antioccidentale qui se répand et qui n’en est probablement qu’à ses prémices. Par ailleurs, la capitulation de Jacques Chirac face aux menaces islamistes dans le cadre de la polémique sur les caricatures danoises, de même que le mea culpa permanent de
la France vis-à-vis de ses anciennes colonies a alimenté un sentiment antifrançais. Comment justifier les campagnes de presse qui ont abouti à assimiler Napoléon à Hitler et amener nos « courageux » président et premier ministre à ignorer le bicentenaire de la bataille d’Austerlitz et à célébrer avec les anglais la défaite de Waterloo ?
Les falsifications de l’interview de Youssouf Fofana sur i-TELE
Le 27 février 2006, i-TELE, qui est la chaîne d’information du groupe Canal + visible sur le câble, le satellite et
la TNT, a diffusé une interview de Youssouf Fofana dans laquelle ce dernier s’exprimait librement.
Nous ne nous attarderons pas sur les explications qui ont été données par la chaîne d’information pour justifier cette diffusion. Ceux qui se sont exprimés à ce sujet se sont contredits à plusieurs reprises. Toutefois, une de nos lectrices nous a signalé qu’i-TELE a falsifié cette interview. En effet, alors que Youssouf Fofana s’exprimait en français et que ses propos étaient parfaitement compréhensibles, l’interview était sous-titrée de façon mensongère. Journaliste d’i-TELE : « Qu’est ce que vous avez à dire à la famille d’Ilan ? »
Youssouf Fofana : « Que leur enfant s’est battu. » Pourtant, i-TELE a sous-titré : « Que leur enfant, je ne l’ai pas tué. » Pour voir l’extrait de l’interview falsifiée, cliquez ici.
Pourquoi i-TELE a-t-elle dénaturé le message de Fofana ?
Le plus étonnant est que les médias qui ont commenté cette interview n’ont pas relevé ce sous
-titrage mensonger. Cela rappelle le faux sous-titrage de Canal + (groupe auquel appartient i-TELE) qui avait, lors des émeutes françaises de novembre 2005, falsifié les insultes proférées contre Nicolas Sarkozy. A l’époque, Nicolas Sarkozy était traité de « sale juif » et cela s’entendait parfaitement à l’antenne. Le Vrai Journal de Canal + avait préféré sous-titrer : « Sarkozy fasciste ». Pour voir, et écouter, ces images, cliquez ici. La manifestation du 26 février 2006
Suite au meurtre d’Ilan Halimi, une manifestation a eu lieu à Paris le 26 février 2006.
Ce défilé a donné lieu à de nombreuses récupérations politiques qui ont entaché ce rassemblement. On a ainsi pu y voir certains hommes politiques qui n’y avaient pas leur place. Comment, par exemple, accepter de défiler avec Renaud Donnedieu de Vabres qui s’emploie depuis plus d’un an à empêcher la révélation de la vérité sur l’affaire Enderlin – France 2 et qui a menti à l’Assemblée Nationale pour couvrir cette imposture ? Rappelons que cette mise en scène a alimenté une campagne d’antisémitisme planétaire, et notamment dans les banlieues françaises. Pourquoi avoir laissé le Parti Socialiste, et ses satellites tels que SOS Racisme ou l’Union des Etudiants Juifs de France, perturber le rassemblement en ostracisant Philippe de Villiers qui n’a jamais tenu de propos antisémites ou racistes ? Le scandaleux traitement de la mort d’Ilan Halimi par L’Humanité
Dans l’ensemble, les médias français ont, après une période de flottement, correctement traité la mort d’Ilan Halimi, Le Parisien ayant été le journal le plus complet sur cette affaire.
Tel n’a pas été le cas de L’Humanité qui a évité le sujet pendant plusieurs jours avant de finalement l’aborder sous un angle pour le moins contestable. Ainsi, l’un des premiers articles consacré à ce meurtre était intitulé « Itinéraire d’un enfant gâché ». Il était consacré à… Youssouf Fofana et tentait d’expliquer sa dérive. Vint ensuite un éditorial de Pierre Laurent « Jusqu’aux racines de la haine » qui s’achevait ainsi : « Condamner les haines, les violences, les racismes, c’est bien. Ne pas les alimenter, c’est beaucoup mieux ». A la lecture de cet éditorial et du quotidien L’Humanité en général, pourquoi ce journal ne s’applique-t-il pas ces conseils à lui-même ?
Pourquoi la famille d’Ilan Halimi a-t-elle le même avocat que Jacques
Chirac ? L’avocat de la famille d’Ilan Halimi est Francis Szpiner. Or, si l’on en croit les informations diffusées sur la famille Halimi, celle-ci n’a pas les moyens de s’offrir les services de M° Szpiner qui est un des ténors du barreau de Paris. C’est alors qu’il faut rappeler que M° Szpiner est un des avocats personnels de Jacques Chirac.
Est-ce que cet avocat a été mis à disposition de la famille par Jacques Chirac ? Si tel est le cas, pourquoi ? Que craint le président français d’un avocat qu’il ne contrôlerait pas ? Pourquoi l’action de la police n’est-elle pas remise en cause par les médias ?
La police a été déficiente dans cette affaire puisqu’elle n’a pas réussi à localiser les kidnappeurs et n’est pas parvenue à remonter jusqu’à eux pendant les trois semaines qu’a duré l’enlèvement.
Pourquoi les médias n’ont pas remis en cause du travail de la police ? Lorsque la police avait été accusée d’avoir poursuivi les deux jeunes qui ont été retrouvés morts dans la centrale EDF de Clichy sous Bois, les médias ont poussé la police dans ses retranchements pour obtenir la vérité. Pourquoi la police française a-t-elle dissimulé cet enlèvement pendant trois semaines ? Est-ce que la discrétion de la police a obéi à des motivations politiques ? Les responsables
Au regard du drame que représente la mort d’Ilan Halimi, il semble qu’il faille chercher à trouver les responsables de ce déferlement de haine.
Qui a bien pu faire entrer dans la tête de Youssouf Fofana et de sa bande que l’on pouvait s’en prendre à un juif pour obtenir de l’argent ?
Qui a bien pu faire entrer dans la tête de cette clique de barbares que torturer et tuer un français, juif ou non juif, était acceptable ?
La réponse est simple : ce sont certains médias, aux ordres du Quai d’Orsay et/ou gangrenés par l’extrême gauche alliée aux islamistes, qui ont, depuis de nombreuses années, menti sur de nombreux sujets au point de développer la haine antisémite et antioccidentale en France. Comment s’offusquer de l’influence grandissante des mouvements islamistes les plus dangereux en France quand on se souvient que c’est l’actuel ministre de l’Intérieur, Nicolas Sarkozy, qui a offert à l’UOIF la vice-présidence du Conseil Français du Culte Musulman (CFCM) ? Pourquoi le gouvernement Raffarin, et principalement Dominique Perben qui était alors ministre de
la Justice, ont-ils refusé d’appliquer les recommandations du rapport Rufin qui proposait, notamment, de pénaliser les propos antisionistes ? Que dirions nous si, dans un pays étranger, les médias donnaient régulièrement la parole à des personnages qui prônaient la destruction de
la France ?
Les falsifications de médias tels que L’Humanité ou France 2 sur des sujets comme l’Irak ou le Proche-Orient n’ont-ils pas conditionné les esprits des tortionnaires d’Ilan Halimi ? Pourquoi les médias n’enquêtent-ils pas sur la terreur au quotidien qui frappe les banlieues françaises ? Est-ce ce terrorisme qui a conduit les habitants de Bagneux à taire ce qu’ils ont probablement vu ou entendu lors de la détention d’Ilan Halimi ? Notons que certains médias ont osé parler d’omerta pour l’évoquer. Que dire alors de la conduite de ces mêmes médias qui taisent la vérité sur le principal faux antisémite et antioccidental qui a été diffusé par France 2 et qui a alimenté, de façon planétaire, la haine du monde musulman depuis le 30 septembre 2000 ?
La désinformation est criminelle, et ceux qui la couvrent en sont les complices. Rayer Israël de la carte » : Ahmadinejad le souhaite, Villepin l’a envisagé Mis en ligne le 31 octobre 2005 Le président iranien a déclaré mercredi 26 octobre, lors d’une conférence – «Le monde sans le sionisme » – qu’il fallait « rayer Israël de la carte ». Ces propos ont été réitérés le vendredi suivant avant d’être, dès le lendemain, amoindris par la diplomatie iranienne.
Cette déclaration a été condamnée par tous les médias français et toutes les diplomaties occidentales.
Une indignation aussi tonitruante qu’hypocrite et artificielle, le président iranien n’étant ni le premier, ni le seul à faire ce genre de déclaration. Rappelons pour mémoire que le Hamas (articles 11 et 15 de sa charte) appelle depuis longtemps à la destruction de l’Etat d’Israël. De même, l’OLP, dont le président palestinien Mahmoud Abbas est toujours le numéro 2, et dont est issue l’Autorité Palestinienne, n’a jamais abrogé les articles de sa charte qui appellent à la destruction de l’Etat d’Israël. Notons d’ailleurs que des représentants du Hamas ainsi que de l’Autorité Palestinienne étaient présents lors de la conférence où M. Ahmadinejad a prononcé ses propos exterminateurs. Aucune condamnation n’est venue de leur part. Plus surprenant, en 2001, l’actuel premier ministre français, Dominique de Villepin, a pronostiqué la disparition de l’Etat d’Israël lorsqu’il était secrétaire général de l’Elysée quand il a déclaré que « l’Etat d’Israël était une parenthèse de l’histoire » et qu’il serait amené à disparaître. Pour ceux qui n’avaient pas connaissance de cette anticipation, rappelons qu’elle a été rapportée par Jean-Marie Colombani dans son livre paru en février 2002, « Tous Américains ? », propos qu’il attribuait à « l’entourage du président Chirac ». Interrogé en privé pour savoir à qui il faisait référence, le directeur du Monde a répondu qu’il s’agissait de Dominique de Villepin. Questionné en juin 2002 pour savoir s’il reconnaissait avoir effectué cette déclaration, celui qui était alors devenu ministre des Affaires étrangères ne l’a pas formellement démentie.
Il peut alors sembler étrange de constater toutes ces récriminations à l’encontre du président iranien et cette soudaine perte de mémoire des médias français lorsqu’il s’agit de leurs propres et actuels dirigeants. Notons que les déclarations de Jacques Chirac viennent corroborer cette analyse. En effet, le président français a certes condamné les propos de M. Ahmadinejad, qualifiés « d’insensés et irresponsables », mais pour la seule raison que le président iranien « a fait courir le risque à son pays, qui est un grand pays, d’être mis au ban des nations ». L’analyse précise des phrases prononcées par Jacques Chirac montre que ce dernier ne se soucie que des risques que M. Ahmadinejad fait courir à son pays, mais aucunement du risque de voir un autre Etat être rayé de la carte. A l’appui de cette analyse, la tribune qui a été publiée dans Le Figaro du vendredi 28 octobre 2005 par Pascal Boniface mérite qu’on s’y attarde, le président de l’IRIS étant bien souvent le porte-parole officieux du Quai d’Orsay dans les médias. Le seul titre de l’article – « Quand le président iranien fait du tort à l’Iran » – montre où se trouvent les préoccupations de cet analyste stratégique qui rejoignent d’ailleurs celles du président français. Enfin, pour mieux apprécier la teneur des propos qui ont été exactement tenus par Mahmoud Ahmadinejad, et que les médias français n’ont pas jugé utile de diffuser, en voici quelques extraits édifiants pour ceux qui pensent que la cible unique du président iranien est l’Etat d’Israël : « La création du régime qui occupe Al-Quods (Jérusalem) a été une manœuvre significative du système globalement dominant et de l’Occident contre le monde islamique. Un combat historique est en train d’être mené entre le Monde Oppresseur et le monde Islamique et les racines de ce conflit ont des centaines d’années.
L’Etat occupant (Israël) est la tête de pont du Monde Oppresseur au cœur du monde islamique. Ils ont construit une base pour pouvoir étendre leur domination sur tout le monde islamique. Il n’y a aucune autre raison d’être pour cette entité sans cet objectif.
La bataille qui se joue en Palestine aujourd’hui est donc celle de la ligne de front du conflit entre le monde islamique et le Monde Oppresseur. Aujourd’hui, la nation palestinienne combat le Monde Oppresseur pour la communauté islamique toute entière. » ————- Suite à la publication de cette « perle », de nombreux lecteurs ont souhaité disposer d’une version anglaise de celle-ci afin de la faire circuler auprès de leurs contacts anglophones.
La voici : “Wipe Israel off the map”: Ahmadinejad wants it, French PM Villepin thought about it 26/01/2007
Mise au point nécessaire suite aux contrevérités diffusées, de façon
répétitive, par la MENA
Nous venons de constater que, suite à la publication de cette perle,
la MENA a rendu son site inaccessible à ses non-abonnés.
Nous avons donc retrouvé sur d’autres sites le contenu des articles de
la MENA que nous citons dans cette perle.
————— Cela fait plusieurs mois que le rédacteur du site de
la MENA, Stéphane Juffa, diffuse des informations erronées concernant Media-Ratings et l’affaire Enderlin – France 2.
Cela a eu pour effet d’induire de nombreuses personnes en erreur et de dénaturer, auprès de certains, la production de Media-Ratings. Jusqu’à présent, nous avions choisi de ne pas répondre pour ne pas faire le jeu de France 2. Toutefois, face à la persistance de ce comportement, voici notre mise au point.
Stéphane Juffa répète, article après article, que Media-Ratings n’a fait que diffuser des articles de la MENA.
Cela est faux, nous n’avons jamais publié d’article de
la MENA. Tout ce que publie Media-Ratings est issu de sa propre rédaction. Si nous insistons sur ce point, c’est que l’affirmation fausse qui voudrait que Media-Ratings ne fasse que diffuser les articles de
la MENA a été un des arguments que la justice française a utilisé pour nous faire condamner. Rappelons la chronologie de l’affaire Enderlin – France 2.
La mise en scène diffusée par France 2 le 30 septembre 2000 a été découverte par le chercheur israélien Nahum Shahaf qui en a révélé toutes les invraisemblances et les incohérences. C’est pour cela que lorsque
la MENA parle de « son enquête », il convient de la réapproprier à M. Shahaf.
C’est le psychanalyste français, Gérard Huber, qui s’est ensuite saisi du travail de Nahum Shahaf. Il l’a apporté à
la MENA, et a publié un livre en janvier 2003 : « Contre expertise d’une mise en scène » aux éditions Raphaël.
Le rôle important de
la MENA dans cette affaire a été de populariser le travail de MM. Shahaf et Huber auprès du public francophone. La partie israélo-palestinienne de cette enquête ayant été réalisée par Nahum Shahaf, il a bien fallu que quelqu’un se charge de sa partie française, notamment de rencontrer les principaux responsables médiatiques et politiques français. C’est Media-Ratings qui s’en est chargé comme le montre le dossier Enderlin – France 2 qui se trouve en page d’accueil de Media-Ratings. Cela sera aussi démontré dans le livre qui sera publié prochainement et qui sera consacré au volet français de cette affaire.
Au départ, nous avons collaboré avec
la MENA qui nous a remis un documentaire que nous avons utilisé. Nous en avons extrait ce qui nous paraissait pertinent, et lors du procès qui nous a opposé à France 2, nous n’en avons fait diffuser que quelques minutes seulement. Il faut toutefois regretter que ce documentaire, qui était le premier à montrer clairement certaines mises en scène de France 2, n’ait pas été mis à la disposition du grand public, sur Internet par exemple. Notons que bien que
la MENA dispose des preuves de Nahum Shahaf depuis plus de 4 ans, elle n’a pas été en mesure de faire évoluer les autorités officielles israéliennes.
Il aura donc fallu que Richard Landes organise une grande conférence à Herzliya, en Israël, en décembre 2006, pour que des officiels israéliens se saisissent fermement de cette affaire et prononcent des propos accablants contre France 2, Talal Abou Rahma et Charles Enderlin. Pourquoi
la MENA n’en a-t-elle pas informé ses lecteurs ? Pourquoi
la MENA n’a pas informé ses lecteurs du reportage que Fox News avait réalisé sur cette affaire ?
C’était pourtant des avancées significatives dans l’affaire Enderlin – France 2. A trois jours de notre procès, pourquoi
la MENA a-t-elle fait référence à un pseudo « Prix Goebbels » qui aurait été remis à Charles Enderlin et à France 2 ? Stéphane Juffa sait pertinemment que cela est faux (voir la photo au bas de la perle) et que ce prix s’appelait le « Prix de la désinformation ». Il sait aussi que c’est un faux argument que France 2 utilise pour diaboliser ses contradicteurs. Etonnamment, une fois que notre procès était passé,
la MENA s’est souvenu de la correcte dénomination de ce prix.
Comment expliquer que
la MENA se soit toujours limitée, lorsqu’elle abordait notre procès, à ne parler que de « Karsenty » (et de ne jamais proposer de lien vers notre site à ses lecteurs) alors que c’était bien Media-Ratings qui était en cause ? Etait-ce pour empêcher les lecteurs de
la MENA de pouvoir observer les discordances entre ce que publie
la MENA et la réalité ? De notre côté, nous avons souvent cité
la MENA et renvoyé vers leur site.
Pourquoi la MENA n’a pas publié de correctif après avoir publié ceci : « … le président Jacques Chirac et l’actuel maire de Paris M. Delanoë, ont remis chacun une lettre – spécifiquement rédigées à cette occasion – au tribunal, faisant l’éloge des qualités de Charles Enderlin… »
Cette information est fausse comme cela peut être observé en cliquant ici, et décrédibilise celui qui la publie. Il est très facile ensuite aux détracteurs de
la MENA d’en tirer profit.
Comment reprocher à France 2 de ne pas avoir corrigé une fausse information si l’on n’est pas soi même capable de rectifier ses erreurs ?
Alors qu’au départ,
la MENA a fortement contribué à populariser l’enquête de Nahum Shahaf, son comportement actuel est de plus en plus préjudiciable car, non contente d’avoir fait fuir les meilleures volontés par ses insultes répétées (voir notamment les propos tenus contre Denis Jeambar et Daniel Leconte), voici maintenant que Stéphane Juffa se déclare être l’inspirateur de traités de paix entre l’Etat d’Israël et la Syrie.
Ce type de propos mégalomaniaques finissent par décourager toutes les personnes qui accordaient encore un peu de crédit à
la MENA. Concluons en rappelant que le véritable découvreur de l’affaire Enderlin – France 2, Nahum Shahaf, n’a pas eu ces attitudes autodestructrices de sabotage et s’est toujours appuyé sur d’autres pour faire avancer la vérité.
Le plus triste dans cette affaire est que ces comportements ne servent que les falsificateurs et leurs supporters. Tous ceux qui connaissent les détails de cette affaire savent que c’est une chaîne de bonnes volontés et de coopérations qui fera éclore la vérité. Ajoutons enfin que
la MENA diffuse parfois des articles remarquables de rédacteurs externes, tels que Luc Rosenzweig, Laurent Murawiec, Guy Millière ou Raphaël Lellouche. Ces auteurs ne sont bien évidemment pas visés par cet article.
Ajoutez votre commentaire | Lire les commentaires (3) | Recommander cette note | 10/01/2007
Les déclarations d’officiels israéliens contribueront-elles à faire
éclater la vérité dans l’affaire Enderlin-France 2 ?
Mis en ligne le 10 janvier 2007
Le 22 novembre 2004, nous avions publié un article : France 2 : Arlette Chabot et Charles Enderlin doivent être démis de leurs fonctions immédiatement. Le 19 octobre 2006, nous avons été condamné pour diffamation à l’encontre de France 2 et de Charles Enderlin, malgré les réquisitions du procureur qui avait demandé notre relaxe. Nous avons bien évidemment fait appel de ce « jugement ». Dans son jugement, le Président Joël Boyer avait écrit, puis répété, que l’argument qui plaidait en faveur de France 2 était que jusqu’à présent, aucune autorité officielle n’avait jamais demandé à voir les images ou contesté le reportage de France 2.
Cette affirmation était inexacte, comme de nombreuses autres contenues dans ce jugement. Ainsi, Raanan Gissin, alors qu’il était le porte-parole d’Ariel Sharon, avait demandé en mai 2005 les 27 minutes d’images de France 2. Pour lire la lettre officielle de Raanan Gissin, cliquez ici. Charles Enderlin avait, sans justification, refusé de lui remettre les images. Voici maintenant que certaines autorités officielles commencent à s’exprimer publiquement au sujet de l’équipe constituée du caméraman, Talal Abou Rahma, du commentateur Charles Enderlin, et du diffuseur, France 2. C’est ainsi que nous vous invitons à découvrir le reportage «
LA FIN D’UN MYTHE » sur la chaîne de télévision en ligne Infolive.tv. Le nouveau rebondissement de l’affaire Enderlin –France 2 est présenté comme suit :
« L’affaire Al-Doura refait surface et six ans après les faits, les langues se délient. De hauts responsables israéliens dénoncent en exclusivité devant les caméras d’Infolive.tv une manipulation médiatique qui avait fait beaucoup de tort à Israël. » Pour voir le reportage en français, cliquez ici. Pour voir le reportage en anglais, dont le sous-titrage est plus précis, cliquez ici. Ce reportage a été réalisé lors de la conférence d’Herzliya, le 18 décembre 2006. Lors de cet événement, Philippe Karsenty, président de Media-Ratings, a présenté l’affaire Enderlin – France 2 aux officiels israéliens.
Dans ce reportage, vous pourrez notamment voir Daniel Seaman, directeur du Bureau de Presse Gouvernemental israélien, s’exprimer ainsi : « Cette histoire de Mohamed Al Doura ne repose sur aucun des critères requis en journalisme professionnel. Les images ne corroborent pas ce que le journaliste français [Charles Enderlin] dit. C’est-à-dire qu’on ne voit pas de soldat israélien tirer dans la direction de l’enfant. Les seules balles que l’on voit dans le film partent dans la direction opposée à celle où se trouvent les soldats. Plus grave encore, le journaliste français ne se trouvait pas physiquement sur les lieux où se seraient déroulés les actes qu’il impute à l’Etat d’Israël. Il a fondé toutes ses informations sur les propos de son caméraman Talal Abou Rahma alors que nous disposons d’assez d’informations pour dire que cet homme est un menteur, qu’il a trafiqué les images et que son unique but était de diffamer l’Etat d’Israël.
Dans leurs images, on voit des séquences mises bout à bout par Talal Abou Rahma dans lesquelles on voit des palestiniens se faire soi-disant blesser par des soldats de Tsahal. Ensuite, dans une autre image, on voit la famille Al Doura [Mohamed et Jamal Al Doura] qui patiente avant d’entrer en spectacle, et j’insiste sur le mot spectacle qu’a mis en scène Talal Abou Rahma pour accuser les forces de Tsahal. Il y avait sur places des images, des rushes pris par l’Associated Press et Reuters qui sont très intéressantes. Leurs journalistes étaient sur place et personne n’a vu cet événement. Un événement où se serait déroulé une scène aussi tragique, ils ne l’auraient pas vu. Aucun autre caméraman ne l’a vue. Si c’est sur cela que la télévision française construit son reportage, elle est criminelle. »
Avant de poursuivre : « Il y a quelques années, Charles Enderlin a exigé que nous nous rétractions et que je me rétracte personnellement et que je retire les propos que j’avais tenus dans Libération. Il a menacé que si l’Etat d’Israël ne faisait pas quelque chose à ce sujet, il me poursuivrait. Il a même demandé pourquoi l’Etat d’Israël ne l’avait pas poursuivi. Nous nous sommes réunis avec les conseillers juridiques du bureau du Premier ministre et nous sommes arrivés à la conclusion qu’il ne valait pas la peine que le gouvernement poursuive un média.
Mais nous avons décidé que nous ne nous rétracterions pas. Et si Charles Enderlin se sent blessé, il peut prendre les recours juridiques qui lui semblent bons. C’est-à-dire que s’il souhaite poursuivre l’Etat d’Israël, qu’il en fasse ainsi. Mais nous ne reviendrons pas sur le fait que l’histoire de Mohamed Al Doura n’est pas exacte comme elle a été présentée par les médias et France 2. » L’ancien porte-parole d’Ariel Sharon, Raanan Gissin, s’exprime aussi dans ce reportage : « Si le gouvernement israélien exige que les rushes de la chaîne française lui soient transmis, alors il va s’agir d’une autre histoire.
Maintenant, on ne peut pas modifier le « mythe Mohamed Al Doura ». Mais au moins, nous rétablirons la vérité qui a été détournée depuis 2002. » Parallèlement à ces déclarations, certains officiels israéliens, bien représentés en France, continuent leur travail de soutenir Charles Enderlin. Mais de nombreux scandales, de corruptions notamment, émaillent la vie politique israélienne actuelle. Il semblerait donc que les « protecteurs » de l’envoyé spécial de France 2 ne resteront plus très longtemps en fonction. C’est pourquoi, lors du procès en appel qui se déroulera le 12 septembre 2007, les juges d’appel devront imaginer d’autres arguments, s’ils veulent confirmer notre nous condamnation face à France 2, tandis que Jacques Chirac et ses collaborateurs qui soutiennent Charles Enderlin, ne seront probablement plus en poste. Alain Duhamel écarté de France 2 : vive l’hypocrisie ! Mis en ligne le 16 février 2007 Alain Duhamel commente la vie politique française depuis plus de 30 ans.
Il collabore régulièrement à France 2, Libération et RTL.
Toutefois, suite à la révélation d’une vidéo tournée à Science Po, en novembre 2006, dans laquelle il affirmait qu’il allait voter pour François Bayrou, il a été suspendu de France 2 et a choisi de se retirer temporairement de sa fonction d’éditorialiste sur RTL pendant la période électorale. On appréciera pour commencer la différence de réaction entre France 2 et RTL. Toutefois, le média le plus vertueux n’est pas celui que l’on croit. En effet, France 2 n’a aucune leçon de déontologie à donner à quiconque car c’est probablement le média qui respecte le moins l’éthique journalistique dans la paysage médiatique français. Que ce soit en politique étrangère où la ligne éditoriale est dictée par la raison d’Etat et le Quai d’Orsay, mais aussi en politique française où la rédaction a régulièrement fait la preuve de son inféodation au pouvoir politique en place. Si vous en doutez, tapez « France 2 » ou « Arlette Chabot » dans notre moteur de recherche.
Rappelons aussi que le président de France Télévisions est Patrick de Carolis qui fut le porte-plume de Bernadette Chirac pour son livre de confidences publié en 2002. De l’autre côté, se trouve RTL qui possède en son sein le journaliste politique le plus indépendant de France, Jean-Michel Apathie. Il suffit de l’écouter tous les matins à 7h50 interviewer ses invités pour entendre ce que doit être une interview politique non complaisante. On peut malgré tout se demander si Alain Duhamel méritait cette sanction. En effet, est-il souhaitable de connaître ouvertement la sensibilité politique d’un éditorialiste ou est-il préférable qu’il la cache et cherche à nous influencer de façon insidieuse ?
Il est vrai que dans certains cas, la question ne se pose pas tellement le biais est flagrant. Ainsi, comment justifier le maintien à son poste d’Arlette Chabot quand on observe la différence de traitement qu’elle réserve à ses invités politiques ? Comment se fait-il que Marie Drucker ait dû quitter son poste alors que Mme Chabot continue à travailler au sein de France Télévisions ? On peut alors se poser une question : Alain Duhamel a-t-il été suspendu de France 2 pour avoir affirmé voter pour François Bayrou ou parce qu’il n’est pas de gauche ou qu’il ne soutient pas le candidat favori de ses patrons ?
Alain Duhamel est-il le seul journaliste de France 2 à n’avoir pas le droit de soutenir ouvertement un candidat ? Pour lever toute ambiguïté, rappelons qu’Alain Duhamel avait déjà été suspendu en 2002 pour avoir coécrit le livre de campagne de Lionel Jospin et qu’il nous était arrivé de le critiquer : « Les médias, la manipulation des esprits, leurres et illusions » de Pierre-Yves Chereul Mis en ligne le 1er février 2007 Nous vous recommandons un livre qui permet de décrypter les dérives de l’information, dans une société où les messages sont pensés pour manipuler le citoyen-consommateur :
« Les médias, la manipulation des esprits, leurres et illusions » de Pierre-Yves Chereul aux éditions Lacour.
Pierre-Yves Chereul y dénonce les discours construits pour obtenir le comportement attendu de l’individu. Au travers de nombreux exemples illustrés, l’auteur démontre comment les mots et les images déforment la réalité, et par là même, l’information qui est diffusée. Il nous donne des astuces pour ne plus être une « media victim » et nous apprend à décoder les messages et les intentions cachées. La notion de l’information est étudiée dans sa globalité. Tous les paramètres sont pris en compte (sa définition, son développement économique, son influence sur les relations sociales,…) pour expliquer comment chacun de nous est susceptible d’être leurré par les médias.
Pour avoir une meilleure compréhension des pièges tendus par les médias, l’auteur en propose plusieurs approches : thématique (le conformisme, l’humanitaire, le sexe), linguistiques et visuels (figures de styles, tonalité, omission de faits, amalgames, utilisation des mythes pour construire un discours…). Précisons toutefois que ce livre est destiné à des personnes averties sur les problématiques de diffusion de l’information. Il souffre parfois d’un manque d’accessibilité dans les terminologies employées mais représente cependant un manuel précieux pour développer un esprit critique face aux messages qui sont diffusés par les médias. Et surtout il aide à ne plus se laisser manipuler… Pour vous procurer ce livre, vous pouvez contacter directement l’auteur à l’adresse mail suivante : pierre.chereul@wanadoo.fr
Envoyer cet article à un « Le marketing politicien » de Michel Bongrand Mis en ligne le 13 décembre 2006 Dans la période électorale qui commence, un livre permet de prendre le recul nécessaire pour comprendre les différentes stratégies de communication qui vont se mettre en place :
Le marketing politicien – Grandeur et décadence des stratégies de
pouvoir
de Michel Bongrand aux éditions Bourin.
Face à l’avalanche de livres politiques qui s’annonce, l’ouvrage de Michel Bongrand est un voyage dans le temps qui retrace l’évolution de la communication politique, depuis la fin de la seconde guerre mondiale jusqu’à nos jours. Michel Bongrand, qui fut un Résistant de la première heure, l’est encore et toujours face aux manipulations actuelles de certains politiques et de quelques médias. Michel Bongrand a ensuite été un des principaux acteurs des premières campagnes électorale de la cinquième République, ce qui lui a valu le titre de « pape de la communication politique ». A travers son livre, il nous en fait découvrir les dessous et les pratiques. Michel Bongrand a aussi initié en France les premières campagnes contre l’alcoolisme et pour la sécurité routière. En cela, il est probablement un de ceux qui a sauvé le plus de vie en France.
« Le marketing politicien » nous permet d’apprendre, notamment, comment, en 1981, Jacques Séguéla s’est approprié un slogan – « La force tranquille » – qui avait été inventé par les équipes de Michel Bongrand pour le candidat Giscard qui l’avait refusé (chapitre 19). Notons enfin que ce livre est dédié à Jacques Chaban-Delmas, qui est le premier homme politique d’une longue série à avoir été « éliminé » par un Jacques Chirac en début de carrière. Envoyer Rapport de l’IGS sur la mort de Zyed et Bouna : les médias occultent l’élément déclencheur de la course poursuite Mis en ligne le 12 décembre 2006 Les émeutes françaises de l’automne 2005 (près de 10 000 voitures brûlées et 3 000 interpellations en 21 jours) furent déclenchées par la mort de deux adolescents, Zyed Benna et Bouna Traore, dans un transformateur EDF le 27 octobre 2005.
Nous avons déjà analysé les errements de certains médias lors de ces émeutes urbaines.
Récemment, un rapport de l’IGS (Inspection Générale des Services) a été rendu public. Les médias français ont commenté ce rapport et tous ont insisté sur la responsabilité des policiers dans la course poursuite qui a conduit au drame : - L’Humanité : « Au final, l’IGS qualifie le comportement de certains policiers « d’une légèreté et d’une distraction surprenantes », - Libération : « le comportement des forces de l’ordre a été «d’une légèreté et d’une distraction surprenante» »,
- Le Figaro : « ce document de quatorze pages souligne que certains fonctionnaires ont, ce soir-là, « fait preuve d’une légèreté et d’une distraction surprenantes », - Le Monde : « Dans ses conclusions, l’IGS établit qu’il y a bien eu une course-poursuite, et critique sévèrement le comportement, « d’une légèreté et d’une distraction surprenantes », de certains policiers. », - 20 Minutes : « Après la publication, jeudi, d’un rapport de l’IGS évoquant la «légèreté» de la police, dans la mort de deux jeunes, le 27 octobre 2005 à Clichy-sous-Bois, le patron de la police des polices Eric Meillan a affirmé qu’au vu de l’enquête disciplinaire menée après la mort de Zyed et Bouna, «aucun manquement à ce jour n’est établi» de la part de la police ». Etonnamment, l’élément déclencheur de la course poursuite rappelé dans le rapport de l’IGS a été ignoré par la quasi-totalité des médias : « Deux ou trois jeunes seraient entrés sur un chantier privé, un autre faisant le guet. Pour l’IGS, » la tentative de vol était bien constituée dans la mesure où ses auteurs n’avaient renoncé à leur action concertée et organisée, non pas de leur propre fait, mais suite à l’intervention rapide et efficace des policiers de
la BAC 833 « »
On observe que seuls Le Figaro et le Monde ont expliqué à leurs lecteurs pourquoi les deux adolescents ont été poursuivis et pourquoi ils ont trouvé « refuge » dans un transformateur EDF. Toutefois ces deux quotidiens ont titré leurs articles sur la « légèreté des policiers ». Serait-ce une façon pour Le Figaro et Le Monde de minimiser l’élément déclencheur de la course poursuite, le vol sur un chantier ? Il s’avère donc que la quasi-totalité des médias a enfreint le critère suivant de la méthode PHILTRE :
- Exhaustivité : non-occultation et non-omission d’éléments essentiels à l’intelligibilité de l’information présentée. Enfin, tout lecteur intéressé par l’affaire regrettera que la totalité du rapport ne soit pas en accès libre. Il aurait pu se faire une idée par lui même de son contenu. Pour lire des extraits du rapport dévoilé par Le Figaro cliquez ici.
L’UMP, productrice de l’image Sarkozy
Article publié le 08 Novembre 2006
Par Raphaëlle Bacqué et Philippe Ridet
Source : LE MONDE
Taille de l’article : 1096 motsExtrait : Les meilleures prises de vue des meetings du ministre de l’intérieur sont gracieusement fournies aux télés par la société ETC, employée par le parti gaulliste. Beaucoup se laissent tenter. Cohue de photographes, cameramen jouant des coudes, gardes du corps aux aguets, conseillers écrasés les uns contre les autres : Nicolas Sarkozy entre en scène. Ces images diffusées dans les journaux télévisés de 20 heures ne sont plus d’actualité. Depuis septembre, tout a changé. C’est désormais un Sarkozy seul qui se présente devant les militants de l’UMP, comme à Marseille le 3 septembre. Quelles relations entretient Nicolas Sarkozy avec les médias ?
Mis en ligne le 24 novembre 2006 Depuis quelques temps, les relations qu’entretient Nicolas Sarkozy avec les médias sont au cœur de l’actualité.
Certains accusent le ministre de l’Intérieur de chercher à les manipuler et/ou de les avoir sous ses ordres.
Le licenciement d’Alain Génestar du magazine Paris-Match et un article récent du Monde ont replacé la relation Sarkozy-médias à la une. Ainsi, Alain Génestar a affirmé, dans un entretien donné au Monde daté du 17 novembre 2006, que Nicolas Sarkozy est directement responsable de son licenciement. Le 30 juin 2006, nous avions publié une perle – « Alain Genestar viré de Paris-Match : Lagardère ne fait visiblement pas la chasse aux anti-Sarkozy » – où nous expliquions que si Arnaud Lagardère souhaitait vraiment se débarrasser des anti-Sarkozy, ses regards devaient se tourner vers d’autres magazines de son groupe. Nous avions aussi publié en octobre 2005 cette autre perle concernant Alain Genestar : « Alain Genestar (Paris Match) & Maurice Szafran (Marianne) : le divorce du naïf et du donneur de leçons ».
Il faut donc probablement percevoir dans les propos récents d’Alain Genestar plus d’amertume qu’autre chose. En revanche, un autre aspect de la relation de Nicolas Sarkozy aux médias pose problème. Ainsi, Le Monde a publié une enquête le 8 novembre 2006 sur la politique de communication de l’UMP vis-à-vis des journalistes et de la télévision : L’UMP, productrice de l’image Sarkozy. Cet article explique comment les communicants de l’UMP ont su imposer une image contrôlée aux télévisions en leur fournissant gratuitement des images préformatées.
Cette enquête nous apprend que, depuis environ un an, la société audiovisuelle ETC (Etudes, techniques et communication) « produit et diffuse les images des meetings du futur candidat ». Grâce à une organisation logistique savamment orchestrée, la société de production dispose de l’exclusivité « du filmage des images de l’entrée en scène » de Nicolas Sarkozy. Elle offre également un point de vue privilégié sur le président de l’UMP et le public. Les cameramen qui souhaitent fournir des images à leur chaîne se retrouvent en difficulté pour exercer leur travail puisqu’ils « sont relégués sur des praticables, de chaque côté de la scène où se tient le candidat ». Il apparaît donc que les images fournies par l’UMP sont une bonne alternative pour les chaînes de télévision. Le Monde explique que ces images étaient « initialement [destinées] aux seuls spectateurs des meetings » mais qu’elles sont maintenant utilisées abondamment par les chaînes de télévision. Les raisons de l’utilisation intensive des images sont multiples : les nouvelles chaînes manquent de moyens, la qualité inégalable des images, leur gratuité et le savoir-faire des équipes de communication de Nicolas Sarkozy.
Le Monde s’interroge sur l’indépendance de l’information en raison de cette mise à disposition d’images « made in UMP ». Selon Arnaud Boutet, président de la société des journalistes de France 2, « la frontière entre propagande, publicité et journalisme peut être assez fine » tandis que Paul Nahon, directeur de l’information de France 3 reconnaît qu’« il est évident, que nous allons devoir régler ce problème avant que la campagne ne soit trop avancée ». Toutefois, il est intéressant de noter que l’UMP assume parfaitement son choix de communication et rappelle que les chaînes sont libres d’utiliser ces images ou non. Notons que ces images « de qualité » produites par l’UMP soulèvent aussi le problème de l’uniformisation des sources d’information. L’acceptation et l’utilisation de ces images par les chaînes encourageront l’UMP – mais peut-être bientôt aussi les autres partis politiques ? – à persévérer ou à suivre dans cette voie.
Les syndicats de journalistes ont peut-être trouvé la parade à ces manipulations médiatiques en suggérant de boycotter les meetings de Nicolas Sarkozy si les journalistes n’ont pas la possibilité d’effecteur leur travail dans de bonnes conditions. On notera que cette analyse des images préfabriquées de l’UMP a été succinctement traitée dans une dépêche AFP du 9 novembre et dans une brève de Libération du 10 novembre 2006. Le journalisme politique est-il en train de se muer en journalisme de communication ? Le Monde, au travers de ces articles, interpelle ses confrères journalistes à ne pas cautionner et entretenir l’influence politique sur les médias. Il est de la responsabilité de chaque professionnel de l’information d’effectuer son travail de manière indépendante. Pour éviter à quelque homme politique de « contrôler le travail des médias », les journalistes ont un devoir éthique : objectivité et indépendance dans la recherche et l’élaboration d’une information. Envoyer cet article à un ami
Alain Genestar (Paris Match) & Maurice Szafran (Marianne) : le
divorce du naïf et du donneur de leçons Mis en ligne le 11 octobre 2005 Le 22 septembre 2005,
Paris-Match a consacré sa couverture, ainsi qu’un reportage de 20 pages, au mariage de la fille de Bernard Arnault, propriétaire du groupe LVMH.
Marianne s’est alors indigné de ce reportage paru dans Paris-Match. Pourtant, ce magazine nous a habitué à couvrir les mariages des princes et des personnes riches ou célèbres.
Dans son éditorial du 6 octobre 2005 – « Chère Marianne » – à lire absolument, c’est Alain Genestar, directeur de publication de Paris-Match, qui répond à son confrère- pour justifier son choix « d’être là où ne sont pas les autres et qu’il voit ce que ne voient pas les autres ». Au service de ses lecteurs, bien sûr : « Couvrir ce très grand mariage, élégant et rarissime, était un reportage dans un monde que les lecteurs ignorent ». Si Alain Genestar en était resté là, sa défense aurait été honorable et respectable. La suite de son propos mérite qu’on s’y attarde. Alain Génestar fustige l’attitude de Marianne :
« Jamais à Match nous ne critiquons la presse » « Je suis surpris, toujours surpris, de voir que
la France est le seul pays au monde où la presse surveille la presse, où le talent de journalistes s’accomplit aux dépens d’autres journalistes, où ce métier difficile est sans cesse brocardé par ceux-là même qui l’exercent, et s’en excusent sitôt qu’on leur parle en tête à tête, loin de leurs chefs. » « La presse française est sous double surveillance. Celle des magistrats qui sifflent ses audaces. Et celle de journalistes qui assurent sa police. De ces deux surveillances, c’est la seconde qui, ici à Match où nous respectons tous les journaux et magazines, même vous chère « Marianne », de loin nous surprend le plus. Et nous navre. » Jamais aucun média n’avait osé publier un tel hymne à l’autocensure, à la connivence, au corporatisme et surtout à la primauté accordée au copinage plutôt qu’au droit du public à être informé correctement.
Si aucun média ne critique la presse, sachant qu’aucun pouvoir n’ose la confronter, qui va dénoncer ses dérapages ?
C’est précisément ce contre quoi nous nous élevons jour après jour dans Media-Ratings :
la France est le seul pays démocratique au monde où les médias se serrent les coudes face à leurs erreurs et fautes répétées. Et jour après jour, le public sanctionne ces connivences en se détournant de la presse quotidienne qui connaît aujourd’hui de grandes difficultés. A la faveur d’un reportage anodin sur un mariage princier, Alain Genestar met en lumière une ligne de conduite inacceptable dans une démocratie digne de ce nom : l’existence d’un pouvoir sans contrepouvoir, celui des médias. L’éditorial d’Alain Genestar aurait pu rester lettre morte.
Mais Maurice Szafran lui a répondu dans le Marianne du 8 octobre 2005 : « Réplique au gentil Genestar ». M. Szafran a commencé par critiquer « l’indécente fiesta de milliardaires organisée par Bernard Arnault » et a poursuivi sur « l’exhibition de consanguinité entre pouvoir économique et pouvoir politique ». Il a voulu ensuite donner une leçon d’éthique journalistique à son confrère : « Qu’en vertu d’une omerta corporatiste, la presse aurait le droit de critiquer tout un chacun, profs, fonctionnaires, policiers, artistes, écrivains, syndicalistes, responsables politiques.
Tout le monde, oui, sauf la presse et les journalistes. Le problème est précisément là : à cause de ce refus du débat contradictoire, le fossé ne cesse de se creuser entre le pouvoir médiatique et l’opinion ; à cause de cette conception élitiste d’un discours médiatique uniforme dont Paris-Match est l’un des distingués porte-voix, la presse hélas est en crise. Une crise terrible. Cela nous navre. »
Nous partageons pleinement l’analyse de Maurice Szafran qui affirme que le débat contradictoire est nécessaire dans une presse libre.
Que ne s’applique-t-il à lui-même cette pétition de principes ?
N’est-ce pas précisément une attitude corporatiste qui l’a conduit à publier dans Marianne du 27 novembre 2004 un article mensonger : « Pour l’honneur du journalisme. Charles Enderlin ne cèdera pas à la chasse aux sorcières ». Cet article signé « M.S. » était un condensé de fausses informations, d’éléments tronqués et d’insinuations trompeuses destinés à couvrir l’imposture de Charles Enderlin diffusée sur France 2 le 30 septembre 2000. Devons-nous rappeler au complice d’Enderlin que cette imposture médiatique a coûté la vie à de nombreuses personnes dans le monde entier ? On s’étonne alors que Jean-François Kahn, personnellement informé par Media-Ratings de l’imposture d’Enderlin, continue à laisser son lieutenant Szafran ternir la réputation de son journal en ne révélant pas la vérité sur ce scandale médiatique d’un tout ordre que 20 pages qui n’ont tué personne. Pourquoi ?
Au nom de l’amitié ? Du corporatisme ? Du discours médiatique uniforme ? Précisons que nous sommes prêts à répondre devant la justice de tout ce que nous affirmons.
Enfin, si M. Szafran milite pour le débat contradictoire, nous sommes prêts à l’avoir avec lui. Preuves à l’appui. Et en toute bonne foi. Il se pourrait qu’il ait été abusé par son « ami ».
MALJOURNALISME ( La Suite )
« Puis la rhétorique « entourbillonne » tel le courant d’un fleuve grossi, dont on ne peut approcher la berge sans qu’il ne vous entraîne au cœur même de ses eaux ». Carlo Michelstaedter,
La Rhétorique et la Persuasion
Je commence, avec ce premier texte, à reproduire ici le long témoignage de Jean-Pierre Tailleur, intitulé Maljournalisme à la française, publié par l’association culturelle de Vouillé, en Poitou-Charente, et, partiellement extrait d’une version antérieure, par le site de la revue Technikart qui, sans doute pour une fois, a su sortir son nez morveux du bidet dans lequel elle aime plus que tout patauger. Ce commentaire, cela va de soi, n’engage que moi… Je n’ai pas encore lu ce livre qui crânement eût dû s’intituler Maljournalisme plutôt que, dans une trouvaille que l’on devine éditoriale, Bévues de presse mais j’ai rencontré, je l’ai dit, Jean-Pierre Tailleur dans un bar huppé du Trocadéro où nous avons bavardé assez longuement. Il ne nous aura fallu pourtant que quelques minutes pour nous rendre compte que le mal que décrit le livre de Jean-Pierre est endémique et nullement cantonné aux médias, fussent-ils aussi vérolés que la verge de Casanova. La même gangrène pourrit à l’évidence la littérature contemporaine, en tous les cas les tristes moignons de ces auteurs qui fréquentent davantage les salles de rédaction que le cloître intérieur du silence, sans l’expérience duquel, aussi douloureuse qu’on le souhaitera, une œuvre n’est rien de plus qu’une trace de bave sur une feuille sale (c’est le cas de le dire avec toute cette malpresse qui nous gouverne…). Déjà d’habiles rumeurs et de judicieux indices, pour qui sait flairer les délicieux fumets de la décomposition, nous indiquent quel sera le degré de fermentation du cirque médiatico-littéraire prochain : les augures nous annoncent un excellent cru et, comble de l’originalité, les plus autorisés s’aventurent à conjecturer, selon l’affreux lieu commun, que la surprise pourrait bien venir de là où on ne l’attend point, peut-être même, allez savoir, la proclamation d’un puissant Veni foras venu d’on ne sait quel puits de ténèbres, seul capable en tous les cas de faire se dresser le cadavre de la littérature française… Je parlai d’une universelle pourriture, d’une mascarade et d’une chute médiatico-littéraire qui n’ont absolument rien à envier à leur cousine parlementaire… Quoi d’étonnant d’ailleurs puisque le langage est un, qu’il soit royal ou prostitué, putain et vérolé sous la plume sale de Pierre Marcelle et de ses risibles clones pornographes, royal et éminent sous celle de… De qui… ? Je ne sais, ne me traversent l’esprit, immédiatement, que quelques noms d’hommes depuis longtemps réduits en poussière, comme si notre âge tout entier était décidément (à tout le moins le devenait de plus en plus) incapable à mes yeux de susciter une parole haute et claire ou bien comme s’il ne parvenait pas à s’oublier pour sonder l’Impénétrable, à se taire pour, selon le commandement de Heidegger habilement repris aux Pères de l’Église, écouter bruire le Verbe… ***
Autopsie d’un boycott médiatique et voyage dans l’édition
Un an, jour pour jour, après la sortie de Bévues de presse, mon essai sur le manque d’autocritique et de rigueur dans nos journaux – sur le maljournalisme en France –, notre pays a été saisi par un vent de remise en cause des médias. Il s’est déclenché avec la parution d’un témoignage de Daniel Carton sur les rapports incestueux entre journalistes et politiciens français, suivi de peu par un brûlot contre le conformisme au Centre de formation des journalistes de Paris. Quelques semaines plus tard, le pamphlet-enquête de Pierre Péan et Philippe Cohen dont les meilleures pages étaient parues dans L’Express, La face cachée du Monde, transformait le vent en bourrasque. Ces quatre livres avaient en commun la critique médiatique mais le premier était autant boycotté que les autres médiatisés. Bévues de presse montre comment, indépendamment de leur ligne éditoriale, les médias de notre démocratie ne remplissent pas suffisamment leur fonction citoyenne – ou civique, pour prendre un mot moins galvaudé. Il demande pour quelles raisons beaucoup de journaux américains et même espagnols exercent davantage un contre-pouvoir et sont souvent plus crédibles que les nôtres. En effet, contrairement à ce que laisse entendre la démonstration partiale du duo Péan-Cohen, la plupart des reproches faits au Monde concernent d’autres publications. Notamment celles qu’ils ménagent beaucoup dans leur essai, du Figaro à L’Express (pour cause…) et au Canard enchaîné. A l’occasion de ce feu de paille polémique de février 2003, deux radios hispanophones et une suisse romande ont sollicité mes commentaires. La plupart des journalistes français susceptibles de parler de Bévues de presse – dans les rubriques livres, médias, société ou dans les émissions-débats – ont affiché le même désintérêt qu’un an auparavant. Pourquoi tant de bruit d’un côté et de silence de l’autre ? Probablement parce que le champ critique de mon essai ne se limite pas à une institution ou à un microcosme. Parce qu’il revient en détail sur la médiocrité de certains articles de journaux sans échappatoires et sans fausses excuses, et parce qu’on peut difficilement lui attribuer un parti-pris idéologique. L’attitude de Daniel Mermet, sur France Inter, illustre cette forme de censure au sujet d’un livre au cœur des débats sur la démocratie. Ce commentateur souvent virulent des phénomènes de société a consacré au moins quatre heures d’émission à la critique des médias en février 2003, en effet. Il a cité à plusieurs reprises toutes sortes d’ouvrages sur le thème, mais en se gardant de mentionner celui qui est particulièrement consacré au manque d’ambition ou de professionnalisme dans notre journalisme. Cette façon de cacher l’existence de Bévues de presse, que le rebelle de France Inter n’a pas été le seul à pratiquer, d’ailleurs, me rappelait les photos soviétiques où l’on effaçait les visages que le régime totalitaire voulait rayer des mémoires. Il n’y a pas mort d’hommes mais la mécanique intellectuelle est la même et elle s’est remise en marche ailleurs. Le Nouvel Observateur fera de même fin 2003 à l’occasion d’un dossier d’une dizaine de pages sur la face cachée du journalisme, tout en se corrigeant peu après.
Le suivisme journalistique
Essai plus argumenté et pas moins polémique que ses cadets d’un an, Bévues de presse a fait seulement l’objet de rares critiques acerbes ou de quelques éloges, généralement succincts et confiés en privé. L’indifférence à laquelle il a eu droit publiquement illustre d’abord la faible curiosité des journalistes pour les travaux d’auteurs et d’éditeurs dont ils ne sont pas familiers ou qu’ils ne peuvent pas attacher à une famille de pensée. Elle traduit, aussi et surtout, leur réticence à réfléchir en profondeur, de façon dépassionnée et par l’analyse des contenus, sur les mauvaises pratiques de la presse écrite, celle qui est à la base de l’information civique. L’attention requise pour la lecture d’un texte plutôt dense, mon manque de notoriété ou bien nos maladresses d’éditeur et d’auteur expliquent peu ce relatif silence. Dans les mois qui ont suivi la sortie de Bévues de presse, j’ai pourtant bénéficié d’un contexte extrêmement favorable. L’actualité mettait au grand jour la menace islamiste ou lepéniste, la gestion controversée de Vivendi ou la coupure entre
la France d’en haut et d’en bas, des thèmes sur lesquels je m’attarde à travers leur (mauvais) traitement journalistique. La crise de la représentation citoyenne rendue visible le 21 avril 2002 tient aussi de l’incapacité de nos rédactions à briser l’indifférence devant certaines réalités sociales, en effet. Un problème de courroie de transmission qui dépasse largement le cas du Monde, d’une école de journalisme ou de la connivence des journalistes avec la classe politique. Mais l’autoflagellation dans les médias, suite à l’échec imprévu de Lionel Jospin, s’est limitée à la rengaine juste mais insuffisante et convenue des journalistes amplificateurs du sentiment d’insécurité. On observe une réticence à se remettre vraiment en cause dans beaucoup d’autres professions mais la dissimulation des vrais problèmes y est plus difficile car par définition, elles ne contrôlent pas l’information. Nos intellectuels, nos médiacrates, ont du mal à s’interroger sur les déficits spécifiques de la presse française par manque de courage ou de clairvoyance. Pierre Bourdieu et ses adeptes, fers de lance de la critique des médias en France, ont eu raison de s’inquiéter de la spectacularisation, des conflits d’intérêt ou de la précarité dans le métier d’informer. Mais on entretient avec ce discours assez univoque une critique biaisée de notre culture journalistique, trop people, parisienne ou politiquement correcte. Les attaques ciblées contre le magazine Voici ou contre le journalisme carpette et cumulard d’un Alain Duhamel sont nécessaires mais insuffisantes. Elles procèdent de considérations idéologiques, morales ou matérielles qui occultent certaines questions qui dérangent davantage la corporation des journalistes. De même, lorsque l’on considère que tel journal est mauvais uniquement parce qu’il est d’un bord opposé ou parce qu’il manque de moyens, on néglige la responsabilité individuelle et professionnelle de ses rédacteurs. Les fautes de quelques figures du journalisme sont parfois dénoncées à juste titre, comme la fameuse interview de Fidel Castro par Patrick Poivre d’Arvor ou bien, depuis peu, les scoops dopés d’Edwy Plenel. Mais ces critiques prennent une tournure si personnelle et démesurée que ces derniers ont beau jeu de crier au lynchage.
Pourquoi certains journaux français sont-ils pires que leurs équivalents étrangers à contexte néo-libéral égal ? Pourquoi nos quotidiens régionaux couvrent-ils si mal
la France profonde ? Les agissements aujourd’hui décriés du Monde sont rendus possibles dans un pays où les standards de qualité dans l’enquête ne sont pas assez définis et partagés. Un contexte que, jusqu’à aujourd’hui, Bévues de presse est le seul essai à décrire dans son ampleur. L’accueil qui lui a été fait offre une série d’illustrations, désolantes ou désopilantes, sur ce maljournalisme aux conséquences parfois dramatiques. I – UN DÉFICIT DÉMOCRATIQUE MAL DÉBATTU
La genèse et l’accueil fait à mon essai illustrent de façon éclatante son contenu. Il devait en effet être publié par Le Seuil au début de l’automne 2001 sous le titre d’Erreur à
la Une, dans la collection L’épreuve des faits co-dirigée par Patrick Rotman. Cet éditeur, par ailleurs essayiste et documentariste reconnu m’avait proposé de signer un contrat d’exclusivité en février de cette année, moyennant une avance correcte pour un auteur débutant (plus de 2000 €). Il me demandait de réduire de moitié le manuscrit afin de le rendre plus concis et agressif, ce que j’acceptais volontiers. Mais après quatre mois de collaboration, une fois les modifications effectuées et entièrement approuvées, Le Seuil a rompu le contrat sans s’expliquer véritablement. Mon essai pouvait entraîner 115 poursuites en justice, selon un rapport juridique de 60 pages rédigé par un avocat de la maison. Le Seuil ne semblait pourtant pas remettre en cause le contenu d’un texte dont le lancement était programmé. Un de ses photographes venait de me mitrailler avec une quinzaine de pellicules aux Buttes Chaumont, et on avait convenu de m’envoyer les épreuves par courrier express en Argentine, où je devais me rendre fin juin. La lecture finale du manuscrit par l’avocat ne devait être qu’une simple formalité devant déboucher sur quelques demandes de précision ou de reformulation. « C’est la première fois, dans ma carrière d’éditeur, qu’on abandonne un projet de publication si avancé » m’a confié Patrick Rotman au téléphone. Mais il a refusé de me recevoir et de me montrer des extraits de cet obscur rapport-de-60-pages. Je n’ai pas eu droit à des éléments d’explication consistants pour comprendre ce changement d’avis qu’il ne semblait pas partager. Le livre ne contient aucune attaque personnelle, en effet, et se base sur des faits incontestables comme mon interlocuteur l’avait souligné à maintes reprises les mois précédents. J’y montre simplement comment des journaux respectés, du Monde à Télérama et à
La Dépêche du Midi, et comment des instances de la profession ou des médiologues estimés font parfois preuve de beaucoup de légèreté sans que cela n’émeuve personne. Le Seuil a probablement changé d’avis après avoir subi des pressions, internes ou externes. Mes propositions de nettoyer le texte de tous les propos qui pouvaient paraître diffamants ont été rejetées. Patrick Rotman a admis que son invitation à rendre le manuscrit plus incisif a peut-être également contribué à cette rupture, mais je n’ai pas de regrets sur ce plan. Grâce à ses recommandations, ce qui pouvait ressembler à une thèse de doctorat, trop longue et lourde, est devenu un texte destiné à tout public intéressé par la thématique du mal français. Cette mésaventure m’a cependant mis dans une situation difficile car j’ai perdu une activité salariée en partie à cause du temps consacré à réduire le manuscrit. Elle m’a aussi confirmé que dans notre pays, on peut s’invectiver dans des pamphlets mal argumentés sur la presse ou bien multiplier les discussions sur la malbouffe tout en ignorant la question du maljournalisme.
Après cette première expérience des milieux de l’édition et sur les conseils dépités et défaitistes de Patrick Rotman, je me suis tourné vers des maisons plus modestes. Elles ont répondu favorablement pour la plupart durant tout l’été 2001, via un courriel dépaysant CAR consulté dans un cybercafé au pied des Andes ou dans la rue Florida, la principale artère piétonne de Buenos Aires. Elles étaient convaincues du caractère pertinent et non diffamant d’Erreur à
la Une, ou bien plus prosaïquement intéressées de prendre la relève d’un grand confère. De retour en France, j’ai failli signer avec les éditions Carnot. Leur sympathique patron s’est fait beaucoup connaître, depuis, en publiant L’Effroyable imposture, essai délirant de Thierry Meyssan sur les attentats du 11 septembre 2001. Mais mon choix s’est finalement porté sur Le Félin, un éditeur qu’Alain Woodrow, ancien journaliste du Monde et auteur de deux livres sur les médias, m’avait présenté et recommandé. Son catalogue d’ouvrages historico-journalistiques me paraissait plus convaincant que celui de Carnot, en effet. On y trouvait des livres de mon mentor (qui a ensuite rédigé une des postfaces de Bévues de presse), de Paul Webster, autre journaliste anglais reconnu, de Christophe de Ponfilly et même de Jacques Ellul et de Voltaire ! Un alibi juridique qui tient mal
Après bientôt deux ans de présence en librairie, je constate que nous n’avons pas reçu la moindre plainte, la moindre assignation, contrairement aux craintes ou au mensonge du Seuil. On imagine mal le lauréat du prix Albert Londres dont je montre les négligences, par exemple, contester ce qu’il a publié sans aucun scrupule dans des enquêtes annoncées en première page du Figaro. Bévues de presse n’est pourtant qu’un clone d’Erreur à
la Une, allégé de certains adjectifs mordants ou de quelques bévues qui m’avaient échappé (eh oui !). J’ai également actualisé le texte avec plusieurs lignes sur le 11 septembre, notamment, car les événements de New York nous avaient fait changer de siècle. Le cas de Zacarias Moussaoui me permettait d’illustrer de façon assez spectaculaire la mauvaise couverture de la menace islamiste en France mais il n’était pas question d’aller au-delà de quelques rajouts ou modifications d’ordre cosmétique. Je savais, à l’instar des éditeurs consultés, que l’essai était plus nuancé et documenté que la plupart des ouvrages polémiques proposés en librairie. Quelques milliers de personnes ont eu connaissance de son contenu, le livre s’étant vendu à environ 2 000 exemplaires (un chiffre normal pour un auteur inconnu mais inacceptable pour un livre qui soulève des questions qui intéressent des millions de Français). La plupart des lecteurs qui m’ont fait part de leur réaction ont jugé la démonstration sévère mais modérée. Ceux qui l’ont trouvée virulente ont généralement confondu le ton mesuré du récit avec la gravité des pratiques dénoncées. Je suis sûr, pourtant, qu’une lecture critique permettrait de me retourner quelques bévues à la figure. Mais c’est trop demander à ceux qui pourraient s’y atteler dans les pages livres ou médias des journaux, en termes de travail et de disposition à débattre de maljournalisme. C’est l’empirisme qui m’a orienté vers cette recherche hors des sentiers habituels… et permis de dissiper les peurs des éditeurs qui pouvaient s’interroger sur le désistement du Seuil. La qualité d’un journal procédant moins de sa ligne éditoriale que du sérieux de ses enquêtes, j’ai choisi de tester la production journalistique française à travers ce dernier critère avant tout. Un restaurant n’est pas mauvais parce qu’il est chinois ou mexicain, en effet, mais parce qu’il sert des plats avariés ou insipides. D’autre part, je ne me suis pas intéressé aux trains qui arrivent à l’heure, de nombreux traités descriptifs sur la presse française ayant déjà été publiés. Il m’a semblé plus pertinent d’opérer comme beaucoup de journaux lorsqu’ils couvrent une problématique, en portant mon regard sur les locomotives en retard, ou mieux, sur les navires qui dégazent incognito en pleine mer.
Cette approche m’a conduit à critiquer des magazines qui, à l’instar des hebdomadaires Marianne ou Valeurs Actuelles, jouent plus sur la rhétorique que sur la substance journalistique. Elle m’a également permis de constater qu’il y a des rédacteurs respectés qui respectent très peu les règles professionnelles de base. Le fait que cela s’effectue trop souvent ouvertement mais dans une indifférence généralisée montre qu’il y a un malaise, des dysfonctionnements profonds dans la production de l’information. Les grands journaux nationaux tels que Le Monde et Le Figaro, L’Express et Le Nouvel Observateur, sont généralement d’un bon niveau bien entendu. Cela ne les empêche cependant pas de commettre des fautes graves, parfois, sans les reconnaître et sans offusquer leurs confrères. Au début du livre, je reviens par exemple sur le scandale du sang contaminé qui a éclaboussé des journalistes du quotidien du soir au début des années 90. L’essai L’Omerta française co-écrit par Sophie Coignard a rappelé trente mois avant le mien certaines compromissions répréhensibles avec le docteur Michel Garretta. Mais Bévues de presse montre comment malgré les affirmations de Bruno Frappat, son directeur à l’époque, Le Monde ne s’est pas expliqué sur les accusations portées contre ses collaborateurs. Il faut comparer cette pusillanimité avec l’attitude de la presse américaine, du Washington Post en 1981 au New York Times en 2003. Lorsque leurs rédacteurs, Janet Cooke et Jayson Blair respectivement, ont été pris en flagrant délit de bidonnage, les deux quotidiens ont lancé une véritable investigation interne, publiée sur de nombreuses pages. Du jamais vu en France. Je dénonce aussi les enquêtes du Canard enchaîné mal ficelées, bâclées ou biaisées, et excessivement focalisées sur le microcosme politico-parisien. Ces défaillances d’un hebdomadaire considéré à tort comme un modèle d’investigation me semblent cependant moins inquiétantes qu’un delta: le décalage passé sous silence entre une réputation et une réalité journalistique. Il en est ainsi, comme je le souligne aussi, parce que les instances de la profession ne s’occupent pas ou très peu de la qualité des articles. A l’instar des intellectuels qui critiquent le contenu des journaux en ne considérant que l’orientation des enquêtes et en dédaignant les questions de méthodologie. Lorsqu’un sociologue s’inquiète de la surmédiatisation de la délinquance dans une catégorie de population, la question est de savoir si le sujet correspond à la réalité et si la collecte d’information a été faite correctement. Le reste n’est que conjecture et posture. Le niveau de qualité des quotidiens régionaux français sort du radar des observateurs des médias, curieusement. Leurs colonnes retranscrivent imparfaitement la réalité démocratique des quatre cinquièmes du pays, pourtant. Ce déficit d’informations alimente beaucoup d’incompréhensions, qui se concrétisent par des chocs électoraux comme celui du 21 avril 2002. Le rédacteur en chef d’un journal national, un ancien localier, m’a d’ailleurs confié que cela le préoccupe, mais en privé.
LE MONDE / POLEMIQUE
vendredi 28 février 2003
Maljournalisme au Monde : réaction de Jean-Pierre Tailleur
par Jean-Michel Pinon
Présent le 21 mars prochain à Bourges dans le cadre de
la Fête de l’internet 2003, Jean-Pierre Tailleur, auteur de l’ouvrage « Bévues de presse : l’information au yeux bandés », n’a pas manqué de réagir à la sortie de « La face cachée du Monde » écrit par Pierre Péan et Philippe Cohen.
« Bévue de presse, l’information aux yeux bandés » est sans aucun doute le premier essai sérieux écrit sur le maljournalisme en France. Dans son ouvrage, Jean-Pierre Tailleur aborde pour la première fois la question du sous-développement de notre presse régionale, démontre le manque de professionnalisme de certains « grands reporters » ainsi que le manque de sérieux des enquêtes « d’investigations », terme, estime-t-il par ailleurs, souvent galvaudé.
La sortie tonitruante de « La face cachée du Monde », écrit par Pierre Péan et Philippe Cohen à propos des dérives du quotidien français supposé le plus sérieux et professionnel, lance à nouveau le débat sur la qualité souvent discutable de nos journaux d’ordinaire bien réticents à faire leur autocritique. Jean-Pierre Tailleur dont la réputation de rigorisme n’est plus à faire, se retrouve alors en première ligne pour apporter ses commentaires éclairés dans la tempête médiatique du moment.
Et c’est toujours avec la même absence de complaisance qu’il s’exprime. Soulignant que « Le Monde reste un grand journal, malgré les reproches faits à ses dirigeants », et qu’il « n’a pas à rougir si on compare sa rigueur d’ensemble avec celle de Marianne », magazine pour lequel travaille l’un des auteurs de La face cachée du Monde, Jean-Pierre Tailleur concède néanmoins que ce pavé – le livre compte environ 600 pages – dans la mare aux canards « est très pertinent et percutant ».
« Ce débat risque d’être assez vain s’il se confine dans des luttes de personnes, de pouvoir et évite des questions qui concernent l’ensemble de la corporation », estime-t-il avec justesse puisque l’essentiel de la polémique actuelle semble se réduire au travers des médias sur la personne des dirigeants du quotidien du soir. Au point que l’on puisse s’interroger sur une volonté délibérée des médias de brider le débat sur les fautes journalistiques mises en évidences dans ce livre et qui ne concernent bien évidemment pas que Le Monde.
L’ancien journaliste du Monde Diplomatique pose ce qui devrait être selon lui la problématique centrale du débat : « la presse française est-elle assez rigoureuse ? Est-elle trop indulgente avec ceux qui publient des enquêtes médiocres ? ». Et Jean-Pierre Tailleur de renvoyer tout le monde dos à dos : « Le Monde ne doperait pas certaines informations si en France le maljournalisme que d’autres pratiquent plus que lui indignait davantage ! »
Il peut paraître en effet curieux que l’ensemble de la presse hexagonale mette en lumière au travers d’un battage médiatique sans précédent sur le sujet, l’ouvrage de P. Péan et P. Cohen, alors que celui de Jean-Pierre Tailleur publié un an plus tôt, qui se penche sur les bévues de nombreuses publications françaises – dont le Canard Enchaîné et L’Express qui a publié en exclusivité plusieurs pages de La face cachée du Monde – a fait l’objet d’une véritable omerta. « L’Express est un magazine de qualité dans l’ensemble. Mais il se targue de critiquer Le Monde tout en ayant passé sous silence « Bévues de presse » ou « La lettre ouverte à Joseph Kessel sur l’Afghanistan », autre critique des médias parue récemment, par Christophe de Ponfilly. Pourquoi ? », interroge Jean-Pierre Tailleur, perfidement.
Alors que la presse européenne regarde avec un œil amusé les média français « laver leur linge sale en public » (Magazine La liberté – Suisse), il est hélas probable que l’on se contente ici de quelques réponses indignées, d’accusations de calomnie et de diffamation, sans aller vraiment au fonds du problème puisque cela remettrait en cause la crédibilité de l’ensemble de la presse hexagonale. Mieux vaut montrer du doigt Le Monde comme un mauvais élève que l’on doit mettre en quarantaine, plutôt que d’avouer que c’est toute la classe qui mériterait d’aller au piquet…
PS : « Bévues de presse – L’information aux yeux bandés », par Jean-Pierre Tailleur, Editions du Félin, 240 pages. Site web : maljournalisme.com
Journaliste-essayiste-traducteur né en 1961 à Buenos Aires. Jean-Pierre Tailleur est diplômé de
la Columbia Graduate School of Journalism (New York, « Master of Science » 1993) et de l’Ecole de Management de Lyon (1986). A la sortie de « SupdeCo Lyon », il entre à
la Société Générale qui l’expatrie à New York. Après six années de banque, il suit sa vocation pour le journalisme en présentant sa candidature à la « Columbia J School ». Jean-Pierre Tailleur a écrit des articles dans les trois langues qu’il maîtrise (français, espagnol et anglais), pour des publications aussi diverses que Le Nouvel économiste, El País, Le Monde diplomatique, El Periódico de Catalunya, Le Midi Libre, The Free Press, Phosphore, France-Amérique, Hommes et migrations. Entre 1994 et 1998, il a également été journaliste économique salarié de l’hebdomadaire L’Usine nouvelle et du mensuel Management. Il s’est ensuite consacré à l’écriture de « Bévues de presse » (intitulé « Erreur à
la Une » initialement par les éditions du Seuil) à partir de recherches initiées dès 1993, tout en collaborant avec une agence de presse de Barcelone. Il a également été traducteur d’espagnol-français, chargé de communication associative, et est intervenu dans différentes écoles et universités (Sciences Po Paris, Barcelone/Columbia et Paris StDenis, Ecole de journalisme de Toulouse, HEC).
Jean-Pierre Tailleur sera à Bourges le Vendredi 21 mars 2003, dans le cadre de
la Fête de l’internet, à l’invitation de L’Agitateur de Bourges pour la conférence « Internet et information de proximité », qui se déroulera dans l’amphithéâtre de l’ESTACOM à 18h30.
« La face cachée du Monde », par Pierre Péan et Philippe Cohen, Fayard, 640 pages.
Les « Bévues de presse » du « maljournalisme » – 28/05/2004
La sortie, il y a deux ans, de « Bévues de presse » a été accueillie par un silence assourdissant de la part de la presse. Son auteur, Jean-Pierre Tailleur, était au Club le 31 mars, pour discuter du « maljournalisme », un concept de son cru. Retour sur un livre qui tape sur tout le monde. Son principal intérêt : présenter des cas concrets d’articles et enquêtes indignes de ce nom. Une courte note de lecture dans Le Monde Diplomatique, une colonne dans Le Point, une 4e place dans le « Top 10 – 2003 » de Technikart… Il fallait être un lecteur de
presse particulièrement attentif pour savoir qu’un certain Jean-Pierre Tailleur publiait, en février 2002, un livre intitulé « Bévues de presse » (1). A part les habitués des sites internet alternatifs consacrés aux médias et les abonnés aux listes de discussion sur le même thème, qui en a entendu parler ? Et pour cause, l’auteur de « Bévues de presse », inventeur du concept de « maljournalisme » (sur le modèle de la « malbouffe » chère à José Bové) tape sur tout le monde ou presque. Le « maljournalisme » pourrait se résumer à un mélange de manque de sérieux et d’enquête bâclée ou inexistante. « En publiant ce livre, Jean-Pierre Tailleur ne se fera pas beaucoup d’amis dans son milieu professionnel, car il ose briser quelques tabous sans épargner les vaches sacrées que sont Le Monde (Ndlr : depuis, la « vache sacrée » Le Monde a pris plus d’un coup dans les cornes…) ou Le Canard Enchaîné », écrivait à l’époque Alain Woodrow, ancien journaliste au Monde (2), dans la postface du livre. Jean-Pierre Tailleur débute d’ailleurs son ouvrage par une confidence : « Bévues de presse » devait initialement « être publié par un « grand éditeur » parisien » (les Editions du Seuil en l’occurrence), qui finalement se désistera.
Journaliste pigiste et traducteur
Jean-Pierre Tailleur est un ancien cadre de la banque, arrivé au journalisme sur le tard. Pigiste pour des supports aussi bien techniques que généralistes (L’Usine Nouvelle, Le Monde Diplomatique, El Pais, Phosphore,
La Dépêche du Midi…), il est également traducteur, bon connaisseur de la presse des États-Unis (où il a débuté sa carrière de journaliste), espagnole et sud-américaine. A la différence des nombreux pamphlets cherchant à démontrer les intentions malveillantes de certains patrons de presse, Jean-Pierre Tailleur dénonce, exemples à l’appui, la qualité médiocre d’articles et enquêtes parus dans la presse française. L’exercice l’amène ainsi à ouvrir au hasard des éditions de la presse quotidienne régionale, pour nous commenter ses lectures. On citera une enquête du Midi Libre sur les opportunités du marché espagnol pour les entreprises du Languedoc-Roussillon, qui multiplie les erreurs et les approximations. Manque de sources pertinentes, statistiques hors sujet ou prêtant à confusion, incohérences entre différents passages de l’article, choix redondants dans les personnes interrogées, affirmations non étayées par des faits… On s’arrêtera là : l’auteur en dénombre vingt. Au hasard encore, un article de
La Voix du Nord qui, sous couvert de une « au parfum d’investigation », n’est en fait qu’un « compte-rendu des travaux de
la Chambre régionale des comptes sur l’endettement de
la Cité sous Pierre Mauroy ».
Les limites de la méthode
Si l’accumulation des exemples a une force de persuasion certaine, la méthode a cependant ses limites. Par exemple, quand l’auteur lit pour nous L’Est Républicain du 13 septembre 2000. Le journal traite de la décision de la mairie de rendre piétonne la place Stanislas. Il s’étonne que nulle part, ne soit exposé le processus qui y a conduit. Ou encore que l’éditorialiste n’explique pas pourquoi il qualifie cette décision de « virage à 180 degrés ». Simple suggestion : le sujet a peut-être déjà été traité en long et en large dans les éditions précédentes ? Même si un journal doit informer ses lecteurs au mieux tous les jours, difficile de faire abstraction de l’éventuel suivi du dossier par le journal de Nancy. Cela aurait mérité vérification. L’autre point faible, c’est l’accumulation de comparaisons. Le propos n’avait pas besoin de ces facilités d’écriture. « Bévues de presse » fourmille de formules du genre : « Que penser de deux critiques gastronomiques ne distinguant pas le cassoulet de la paella ? » En l’occurrence, Jean-Pierre Tailleur réagit à une remarque, qu’il juge idiote, signée de Florence Aubenas et Miguel Benasayag (dans «
La Fabrication de l’information », éditions
La Découverte) : « Tous les journaux de Londres à Tokyo traitent les événements de la même façon ».
Investiguer sur les investigateurs
Cela ne remet pas en cause les enseignements de l’essai. La comparaison opérée entre la presse française et espagnole, dont plusieurs titres nationaux impriment des éditions locales (qui s’ajoutent aux titres strictement locaux) rédigées par de véritables équipes détachées, laisse songeur. Des exemples cités par l’auteur, on sort effectivement convaincu que le rôle citoyen de la presse locale est beaucoup plus à chercher de l’autre côté des Pyrénées que chez nous. Intéressantes également les pages consacrées à la presse américaine, qu’un certain conformisme bien pensant aime à caricaturer en porte-parole partisan, au service de l’hégémonisme US, croulant sous les scandales à répétition. Rappelons juste le cas le plus médiatisé, celui de Jayson Blair, journaliste viré du prestigieux New-York Times, après avoir reconnu des bidonnages en série. Dénoncer les égarements des voisins est légitime, à condition d’accepter de s’observer soi-même. « Je connais le cas équivalent d’un journaliste de Libé qui a été viré dans un silence assourdissant », assurait ainsi Jean-Pierre Tailleur lors de sa venue au Club. Dans « Bévues de presse », il explique également que la presse américaine dispose de vrais titres critiques et d’investigation sur les médias (Newspaper Research Journal, Columbia Journalism Review, American Journalism Review, Extra…), dont manque cruellement
la France. Les quelques rares médiateurs nommés dans les médias français (au Monde et à France 2) semblent également beaucoup moins incisifs sur la qualité et le sérieux du travail des journalistes que les « ombudsmans » américains. Ces derniers sont d’ailleurs des représentants des lecteurs auprès de la rédaction et non l’inverse comme en France.
« Le Canard » y laisse des plumes
Le livre de Jean-Pierre Tailleur a également pour qualité de ne pas réserver ses flèches à
la PQR. L’auteur épingle ainsi plusieurs exemples d’enquêtes non étayées et d’articles basés sur trop peu de faits précis, dans les colonnes de Marianne, du Point, de Télérama… Comme le précise Alain Woodrow dans la post-face, l’auteur ose remettre en cause la réputation de sérieux et d’investigation du Canard Enchaîné, dont il reconnaît toutes les qualités par ailleurs. Son étude des articles consacrés à la chute de Vivendi met en évidence un manque de compréhension des chiffres et des notions économiques maniés par les rédacteurs. Tout en précisant qu’en fait d’investigation, beaucoup de papiers se fondent sur des notes et des rapports plus ou moins confidentiels, confiés à la rédaction par des sources anonymes, du moins pour le lecteur. « Il faut aussi avoir le courage d’attaquer les journaux qu’on nous présente comme inattaquables », commentait Jean-Pierre Tailleur au Club. Evidemment, conclure que la presse française est bonne à jeter serait idiot. Ce n’est d’ailleurs pas l’intention du journaliste. Son but semble, tout simplement, de montrer que la médiocrité peut se rencontrer dans tous les titres, même ceux d’une qualité supérieure à la moyenne.
« Il faut être factuel », disait-il également l’autre jour, pour regretter que trop d’articles adoptent le ton éditorial sans l’étayer par un travail d’enquête et de reportage. Si le lecteur de presse ne devait retenir qu’une chose de « Bévues de presse », ce pourrait être de toujours conserver son regard critique. Devant une feuille de chou comme devant les signatures et les titres les plus prestigieux. Ludovic FINEZ (1) « Bévues de presse. L’information aux yeux bandés », Jean-Pierre Tailleur, Éditions du Félin, 235 pages. L’auteur anime également un site internet (maljournalisme.chez.tiscali.fr).
Retour (2) Alain Woodrow est l’auteur de « Information Manipulation » et « Les Médias. Quatrième pouvoir ou cinquième colonne », aux Éditions du Félin.
Le Maljournalisme auto-amplificateur
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Thursday 2 February 2006 | General | Email | Print
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Le Maljournalisme auto-amplificateur
Source : Stalker
Il semble logique que je publie dans
la Zone, après avoir évoqué hier l’imprécateur Karl Kraus, un nouvel article évoquant un cas de maljournalisme caractérisé. L’article ci-dessous consacré au récent ouvrage d’Yves Agnès intitulé Le grand bazar de l’info, est signé par mon ami Jean-Pierre Tailleur qui s’était illustré dans la Zone par la publication de plusieurs textes regroupés dans la catégorie Maljournalisme, terme dont il est sans conteste l’inventeur, n’en déplaise à ce même indélicat Yves Agnès, pourtant donneur de leçons journalistiques. Comme si un journaliste pouvait critiquer avec beaucoup de sérieux le travail d’un autre journaliste ! C’est bien là d’ailleurs l’un des sujets que nous avions abordés avec Jean-Pierre qui, tout de même bon prince, finit par me concéder que, sans doute, une critique impartiale sur le journalisme et ses errances ne pouvait effectivement venir que de l’extérieur de la forteresse, comme Kraus tenta d’en illustrer la prise, à la fois journaliste et plus que journaliste : écrivain, donc pourfendeur irréductible de la fausse parole disséquées par Armand Robin. «Aller au devant de ce qui peut nourrir le débat. Essais, documents, romans, récits, la ligne éditoriale est tracée avec exigence. Pointer, quel que soit le genre, l’endroit où ça fait mal. Se battre contre le silence qui est la pire des plaies et avoir une démarche militante du point de vue des idées. Avec le parti pris de ne pas en avoir.» Yves Michalon. «Aller au devant de ce qui peut nourrir le débat. Essais, documents, romans, récits, la ligne éditoriale est tracée avec exigence. Pointer, quel que soit le genre, l’endroit où ça fait mal. Se battre contre le silence qui est la pire des plaies et avoir une démarche militante du point de vue des idées. Avec le parti pris de ne pas en avoir.» Yves Michalon. Yves Agnès, Le grand bazar de l’info, éditions Michalon Les éditions Michalon ont publié dans les dernières semaines de 2005 une énième critique du journalisme français, intitulée Le grand bazar de l’info. Cet essai n’est qu’un entremêlement de propos convenus, parfois sensés mais amplement ressassés, sur les défauts les moins gênants et les plus avouables de la presse française. Les travers vraiment préoccupants et révélateurs de ses mauvaises pratiques sont occultés pour l’essentiel. L’auteur, Yves Agnès, est un ancien rédacteur en chef du Monde et a dirigé une des deux écoles de journalisme françaises les plus reconnues. Malgré (ou bien à cause) de ces deux titres dignes d’une Légion d’honneur de sa corporation, l’essai publié par Yves Michalon ne présente aucun intérêt. Le style fluide, saupoudré de pointes de grandiloquence, et les retours sur l’Histoire de la presse de ce si bien nommé Grand bazar, cachent mal sa vacuité comme l’a déjà souligné Fabrice Trochet du Grain de sable. Mais il est utile d’analyser et de réfléchir sur son contenu car il illustre parfaitement ce que je qualifie de «maljournalisme» dans mes critiques sur les médias. Le livre d’Yves Agnès a ironiquement – et accessoirement – la particularité d’être sous-titré Pour en finir avec le maljournalisme. L’ancien directeur général du Centre de Formation et de Perfectionnement des Journalistes (CFPJ) reprend ainsi un terme que j’ai lancé en 2002 dans Bévues de presse ou à travers mon site, sans jamais faire référence à l’un ou à l’autre. Le Stalker a contribué à populariser ce néologisme en en faisant un titre d’une rubrique qui réunit certains de mes textes (extraits de mon deuxième livre, Maljournalisme à la française). Ces critiques et ces constats sur la presse française sont en quelque sorte les pendants journalistiques des flèches de Juan Asensio contre la mal-littérature. Le chien de garde du Stalker m’a proposé de réitérer l’expérience avec une critique du Grand bazar de l’info. Voici donc.
Une précision pour commencer : Yves Agnès a tout à fait le droit d’employer le mot maljournalisme, si évident avec la popularisation du terme malbouffe. Je reviendrai plus loin sur ce qui est toutefois un manque d’élégance et un aveuglement de sa part, à mettre dans la série des mésaventures parfois cocasses vécues avec Bévues de presse. Il faut d’abord se pencher sur le contenu de son essai, inquiétant car il illustre page après page l’incapacité de la presse française à se remettre en question sans faux-fuyants. Cette mauvaise habitude intellectuelle a des conséquences graves sur le plan socio-politique, à moins que l’on dénie toute contribution utile au «quatrième pouvoir».
Le grand bazar de l’info est le symptôme amplificateur des maux qu’il prétend dénoncer, en effet. En ouvrant cet essai, on a l’impression de lire une liste de sujets déjà traités ces dernières années dans Arrêt sur images, l’hebdomadaire autocritique de la télévision. Ce livre m’en a rappelé un autre, d’ailleurs, apparemment plus futile, L’Audimat à mort (2004). Son auteur Hélène Risser, une ex-collaboratrice de l’émission de France 5, concentre ses tirs sur la télé-réalité et l’info-spectacle avec une argumentation plus consistante. Elle ne se contente pas de lamentations sur des fautes déjà médiatisées par Daniel Schneidermann dans son rendez-vous dominical, son récit apportant des compléments d’information instructifs. Pour prendre un des exemples les plus éloquents, la «pipolisation» progressive de l’émission Envoyé spécial, sur France 2, est abordée en quelques lignes dans Le grand bazar. Inversement, L’Audimat à mort consacre huit pages au magazine-alibi de la chaîne publique, avec des faits qui vont au-delà de ce qu’Arrêt sur images a pu dénoncer au fil des ans. Le témoignage d’Hélène Risser est un hommage à l’écrit, tandis que ce que raconte l’ancien rédacteur en chef du Monde n’apporte rien de plus que des commentaires rapides et dérisoires entendus à la radio ou à la télévision.
Faute d’enquête en profondeur, avec un festival de platitudes en guise de diagnostic sur la mal-information en France, Yves Agnès a fait du maljournalisme tout en croyant le combattre. Les défauts de son livre ne se limitent pas aux fautes d’orthographes sur les patronymes de deux Michel, par exemple (le docteur Garretta et le philosophe Benasayag). Celui qui a pourtant publié un Manuel de journalisme manque surtout de rigueur avec une série de mensonges par omission. Des oublis qui alimentent les contrevérités entretenues depuis des années par la «médiologie» française. Illustration avec une phrase tirée du premier chapitre: «On a encore en mémoire le cas de Janet Cooke, du Washington Post, un temps lauréate en 1991 du prix Pulitzer pour un reportage entièrement fabriqué».
Ce bref rappel historique au sujet d’une faute qui secoua la presse américaine est ahurissant et significatif à de multiples titres. D’une part, Yves Agnès se trompe d’une décennie (1981 et non pas 1991). Ensuite, le reportage de Janet Cooke n’était pas «entièrement» inventé, et puis le Pulitzer lui a pratiquement été retiré sur le champ. Le Washington Post s’est même amplement expliqué sur cette faute au bout de quelques jours. Enfin et surtout, l’auteur du Grand bazar se garde de citer des bévues liées au franco-français prix Albert Londres.
Le directeur du Monde diplomatique Ignacio Ramonet, qui semble être une des références intellectuelles de l’ancien professeur de journalisme, tient les mêmes propos malhonnêtes dans son essai
La Tyrannie de la communication. Malhonnêtes parce que cet exemple états-unien, ressassé depuis plus de deux décennies, permet d’occulter un point bien plus préoccupant pour la démocratie en France. Une question au cœur de la notion de maljournalisme selon la définition que j’ai donné à ce terme : l’incapacité de la presse française d’enquêter et de s’expliquer sur certaines fautes majeures qui lui sont totalement imputables.
L’ancien chargé de rubrique «Communication» du Monde reprend aussi, logiquement, le discours altermondialiste qui voit dans le néo-libéralisme le principal virus qui infecterait les journalistes français. Cette posture est souvent légitime mais d’autres essayistes l’ont développée déjà, avec plus de pertinence et d’arguments précis (Serge Halimi pour ne citer que lui). En outre, cette cause n’explique que partiellement – et toujours unilatéralement – les raisons de la mal-information en France. Je l’ai amplement démontré dans Bévues de presse en comparant certains journaux de l’Hexagone avec ceux d’autres pays aussi «sous-pression-néo-libérale», à l’avantage de ces derniers. J’ai également eu l’occasion de faire ce type de constat avec des étudiants en journalisme, en mettant en parallèle les nouvelles formules du Figaro et du Guardian ainsi que des enquêtes primées en France et aux Etats-Unis.
L’ancien patron du CFPJ ne révèle ou ne développe aucun cas de maljournalisme, il en ignore d’autres ou bien parfois, plus subtilement, il en minimise certains. On comprend mal pourquoi, par exemple, alors qu’il évoque les fautes de son ancien journal lors des affaires du sang contaminé ou Alègre-Baudis, il ne cite pas les noms des rédacteurs pris en flagrant délit professionnel. Dans le sixième chapitre intitulé «Malaise» (sic), Yves Agnès prend même la défense d’Alain Ménargues, l’ex-patron de la rédaction de Radio France Internationale, évincé fin 2004 pour avoir tenu des propos nauséabonds. «On lui reproche d’avoir qualifié Israël d’”État raciste”» explique simplement l’auteur du Manuel de journalisme. Or on a reproché à Alain Ménargues son discours antisémite lorsque par exemple il a déclaré, dans une radio d’extrême droite, que les juifs avaient créé eux-mêmes leur premier ghetto à Venise. Dans une conférence en mars 2005 à Montpellier, il a même souligné des «similitudes entre le nazisme et l’extrémisme sioniste», en ajoutant : «Entre 1933 et 1938, des SS ont visité
la Palestine.»
Comme beaucoup d’observateurs des médias français, souvent insensibles à des travers inadmissibles, Yves Agnès souffre d’une infirmité intellectuelle qui ne le rend pas seulement sourd aux commentaires judéophopes d’un ex-ponte de RFI. Cette maladie corporatiste fait aussi de lui un aveugle face aux constats exposés dans Bévues de presse, les ignorant au lieu de les critiquer ou de les accepter. C’est le cas, notamment, quand il cite pour modèle – à plusieurs reprises – le quotidien Ouest France. Quelles que soient les qualités de ce journal, on ne peut pas dire qu’il soit un battant du journalisme d’investigation, à commencer dans ses zones de chalandise. Comme la plupart de ses confrères régionaux, il est même plutôt un symbole de la sous-information dont souffre la société française. Ce déficit médiatique qui conduit à l’incompréhension entre les élites parisiennes et «les gens». Cette incommunication française dont on se lamente quand les banlieues «se révoltent» ou lorsque le Front national connaît des succès électoraux…
Comme je l’ai déjà indiqué, Le grand bazar de l’info contient également des passages sur lesquels il est difficile d’être en désaccord. Son auteur regrette la précarité, l’excès de paresse ou le manque d’ambition de beaucoup de journalistes, en précisant «ces vingt dernières années». On ne comprend pas bien pourquoi la mal-information se serait particulièrement développée depuis 1986, au moment de la privatisation de TF1, mais bon… Il défend aussi l’idée de la création d’instances d’autorégulation de la profession des journalistes, non sans raison. Toutefois, le refus ou l’incapacité d’Yves Agnès de reconnaître des cas de maljournalisme majeurs – et l’idée que ces organismes seraient contrôlés par des critiques opérant comme lui – donne froid dans le dos. J’écris ces lignes au moment même où nos bonnes âmes occidentales s’indignent que la société Google ait accepté de retirer de son moteur de recherche des références à des sites qui agacent les autorités chinoises. C’est pourtant exactement ce que fait le Grand bazar, en dévalorisant, en retirant du sens au concept de maljournalisme.
Je reviens et termine sur le fait qu’entre les lignes, Yves Agnès se présente comme l’inventeur d’un néologisme que j’ai déjà amplement utilisé (pour vérifier, il suffit de taper le mot dans… Google justement). Les éditions Michalon et leur auteur ont feint d’ignorer cette antériorité alors que ce dernier, croisé lors d’une conférence sur les médias en 2002, avait entendu parler de mes travaux. Mais je regrette surtout l’appauvrissement de ce concept dans leur livre, véritable bond en arrière faute d’ignorer les constats déjà désignés du label «maljournalisme». Un journaliste et un éditeur cramponnés au Minitel à l’époque d’Internet à haut débit n’auraient pas fait mieux.
Dans mes travaux, ce nouveau terme concerne d’abord le manque d’enquêtes sérieuses dans des journaux dont il faut remettre en cause la notoriété. Cette approche induit, par voie de conséquence, un retour sur toutes les idées reçues concernant la presse française, et en particulier sur ses animaux sacrés. La réputation usurpée du Canard enchaîné par exemple, et la légèreté de nombreuses enquêtes publiées dans des hebdomadaires de droite comme de gauche (Marianne et Valeurs actuelles notamment). Ce type de remise à plat est plus riche, plus constructif, que des pleurs (et des leurres) sur la marchandisation de l’information.
De même que le terme «mal-litterature» pointe du doigt les prises pour modèles de mauvais écrivains comme les dénonce Juan Asensio, le maljournalisme doit désigner les prescriptions malhonnêtes de travaux journalistiques médiocres. A l’aide de comparaisons internationales, ce concept permet de souligner le relatif manque de débat sur la qualité des contenus des journaux, dû à la pauvreté du journalisme sur le journalisme en France. De même que la malbouffe concerne les concepteurs et les producteurs de nourriture et pas seulement les intermédiaires que sont les restaurateurs, le maljournalisme ne peut pas se limiter aux fautes de certaines rédactions. Il concerne d’abord l’indifférence ou la malhonnêteté intellectuelle de «médiologues» qui ignorent des pratiques journalistiques déplorables.
Le titre, Le grand bazar de l’info décrit bien le contenu d’un livre qui, contrairement à ce qu’indique son sous-titre, ne peut que contribuer à consolider le maljournalisme en France. A moins que ses lecteurs ne le parcourent au second degré, comme un contre-modèle de regard à avoir sur le métier d’informer. Souhaitons-le, en les invitant à réfléchir également aux prétentions affichées par Yves Michalon en page vitrine de son site : «Pointer, quel que soit le genre, l’endroit où ça fait mal. Se battre contre le silence qui est la pire des plaies». Un beau credo.
En publiant un essai sur la base du pedigree de son auteur bien plus que sur sa valeur intrinsèque, cet éditeur a indirectement abordé une autre question douloureuse, la «mal-édition» en France… Un thème sur lequel il conviendrait également de s’attarder. |
Bien entendu c’est off de Daniel Carton (Albin Michel, janvier 2003) et Les petits soldats du journalisme de François Ruffin (Les Arènes, février 2003).
Mille et une nuits (26 février 2003). Bévues de presse, publié par Le Félin le 26 février précédent, est présenté sur plusieurs sites Internet, notamment celui au titre de Maljournalisme qui lui est dédié (bien référencé sur Google).
Daniel Mermet a reçu Bévues de presse, à l’instar de nombreux journalistes et prescripteurs, et sait bien que l’ouvrage existe comme me l’ont rapporté deux confrères.
Le Nouvel Observateur du 30 octobre et du 13 novembre 2003. Je reviens sur cette enquête et sur le rectificatif de l’hebdomadaire dans la conclusion de ce récit.
Lire en annexe la critique d’un appel éloquent d’Ignacio Ramonet pour un Observatoire français des médias.